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Colonnes d'Hercule à Gibraltar
Les Colonnes d'Hercule, monument à Gibraltar.

Les Colonnes d'Hercule ou Colonnes d'Héraclès est le nom donné, dans l'Antiquité classique, aux montagnes qui bordent le détroit de Gibraltar. Il s'agit du rocher de Gibraltar[1] (Calpe en latin) au nord, sur la rive européenne, et du mont Abyle (Mons Abyla), aujourd'hui djebel Musa, sur la rive marocaine. Pour les Romains, elles symbolisaient la frontière entre le monde civilisé (Mare nostrum) et un au-delà océanique inconnu et dangereux.

Colonnes d'Hercule
Les deux Colonnes d'Hercule : djebel Musa et rocher de Gibraltar, apparaissent à la droite et à la gauche de cette photo.
Colonnes d'Hercule à Ceuta
Les deux Colonnes d'Hercule, Abyle et Calpe (Ceuta).
Les Colonnes d'Hercule comme sur les armoiries d'Espagne.
Table de Peutinger : Colonnes d'Hercule.

Les Colonnes ont reçu leur nom d'un des douze travaux d'Héraclès latinisé en « Hercule » et plus particulièrement celui durant lequel il dut récupérer les bœufs de Géryon, monstre au triple-corps habitant dans « l'extrême Occident »[2] pour les ramener à Eurysthée qui les offrit à Héra en sacrifice. En dehors de la réalité géographique mentionnée par les auteurs anciens, la localisation des colonnes d'Hercule relève également du mythe ; elles ont pu être situées selon différentes traditions, souvent ésotériques, en différents lieux selon les mythes qu'elles rejoignent.

Histoire

Selon la mythologie grecque adoptée par les Étrusques et les Romains, lorsque Héraclès dut effectuer ses douze travaux, l'un d'eux, le dixième, était de chercher les bovins de Géryon de l'extrême occident (le Maroc actuel) et les amener à Eurysthée ; cela a marqué le prolongement vers l'ouest de ses voyages. Un passage perdu de Pindare cité par Strabon était la première référence de traçabilité dans ce contexte : « les piliers que Pindare appelle les « portes de Gades » quand il affirme que ce sont les limites les plus éloignées atteintes par Héraclès »[3]. Par ailleurs, l'assimilation, depuis Hérodote, entre Héraclès et le dieu phénicien Melqart laisse penser que les colonnes sont près de Gades / Gadeira (actuelle Cádiz), notamment du fait que Melqart avait à Gadès un temple important[4].

Selon le récit du Timée de Platon[5], le royaume perdu d'Atlantide était situé au-delà des colonnes d'Héraclès, le plaçant dans le domaine de l'inconnu. Selon une tradition de la Renaissance, les piliers portaient l'avertissement Non plus ultra[6], servant d'avertissement aux marins et navigateurs de ne pas aller plus loin.

Selon des sources romaines, alors qu'il se rendait au jardin des Hespérides, Hercule devait traverser la montagne qui était autrefois l'Atlas. Au lieu d'escalader la grande montagne, Hercule aurait utilisé sa force surhumaine pour se fendre un passage. C'est ainsi qu'il relia la mer Méditerranée à l'océan Atlantique et forma le détroit de Gibraltar. Une partie de la montagne fendue est Gibraltar et l'autre est soit Monte Hacho, soit Djebel Musa. Ces deux montagnes prises ensemble ont depuis lors été connues comme les « Colonnes d'Hercule », mais d'autres éléments naturels ont été associés à ce nom. Diodore de Sicile[7] cite une autre version selon laquelle, au lieu de briser le mont pour créer le détroit de Gibraltar, Hercule aurait au contraire rétréci un détroit existant pour empêcher les monstres de l'océan Atlantique d'entrer dans la mer Méditerranée.

Évolution du nom

Avant le terme géographique de « Colonnes d'Héraclès » qui s'impose au VIe siècle, les Grecs employaient celui de « Colonnes d'Atlas »[8] qui avaient plus une fonction plutôt cosmogonique que géographique[9].

D'après Élien[10], les colonnes d'Hercule portèrent d'abord, suivant Aristote, le nom de Briarée, le géant aux cent bras qui, déjà selon Hésiode[11], assista Zeus dans sa lutte contre les Titans.

Avant la conquête musulmane, le rocher de Gibraltar était appelé « Mont Calpé ». Le nom de « Gibraltar » n'apparaît qu'à partir de 711 ; il vient de l'arabe Jebel Tariq, la montagne de Tariq, nom du premier conquérant musulman ayant mis pied sur le rocher au début de la conquête musulmane de la péninsule Ibérique[12].

Usage moderne

Les Colonnes d'Hercule sont les supports des armoiries de l'Espagne. Elles sont utilisées pour la première fois dans les armoiries du roi Charles Ier d'Espagne, aussi empereur des Romains comme Charles V. Elles portent sa devise personnelle Plus ultra, signifiant que les colonnes étaient une porte.

Notes et références

  1. Lucien de Samosate 2015, p. 121.
  2. Bruno d'Agostino, « L'expérience coloniale dans l'imaginaire mythique des Grecs », dans G.P. Carratelli (dir.), Les Grecs en Occident, Bompiani, Milan, 1996, p. 209-214.
  3. Strabon, 3.5.5 ; le passage de Pindare semble perdu.
  4. (en) Walter Burkert, Greek Religion, , 493 p. (ISBN 978-0-674-36281-9, lire en ligne), p. 210.
  5. Platon, Timée [détail des éditions] [lire en ligne] (24e-25)
  6. Non plus ultra : « plus rien au-delà »
  7. Diodore de Sicile, Bibliothèque historique [détail des éditions] [lire en ligne] : Livre IV, fin du chapitre V lire en ligne.
  8. Homère, Odyssée [détail des éditions] [lire en ligne] Chant I (52-55).
  9. C. Jourdain-Annequin, « Héraclès en Occident. Mythe et histoire », dans Dialogue d'Histoire ancienne no 8, 1982, p. 266.
  10. Élien, Histoires variées [lire en ligne], V, 3.
  11. Hésiode, Théogonie [détail des éditions] [lire en ligne].
  12. « Tariq ibn Ziyad (VIIIe s.) », sur www.universalis.fr (consulté le )
(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Pillars of Hercules » (voir la liste des auteurs).

Annexes

Bibliographie

  • L’Odyssée (trad. du grec ancien par Victor Bérard), Éditions Gallimard, (1re éd. 1956) (ISBN 2-07-010261-0) Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Émile Chambry, Émeline Marquis, Alain Billault et Dominique Goust (trad. du grec ancien par Émile Chambry), Lucien de Samosate : Œuvres complètes, Paris, Éditions Robert Laffont, coll. « Bouquins », , 1248 p. (ISBN 978-2-221-10902-1), « Dialogue Marins » Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Luc Brisson (dir.) (trad. du grec ancien par Luc Brisson), Timée : Platon, Œuvres complètes, Paris, Éditions Flammarion, (1re éd. 2006), 2204 p. (ISBN 978-2-08-121810-9) Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • C. Jourdain-Annequin, « Héraclès en Occident. Mythe et histoire », Dialogue d'Histoire ancienne, 1982, 8, p. 227–282 lire en ligne
  • C. Jourdain–Annequin, Héraclès aux portes du soir. Mythe et histoire, Besançon - Paris, 1989 lire en ligne lire un compte-rendu de l'ouvrage
  • C. Jourdain-Annequin, « Héraclès en Occident », dans C. Bonnet et C. Jourdain-Annequin, Héraclès d’une rive à l’autre de la Méditerranée : bilan et perspectives, Bruxelles – Rome, 1992, p. 263–291 lire un compte-rendu de l'ouvrage
  • Antonelli Luca, « Aviénus et les colonnes d'Hercule », Mélanges de la Casa de Velázquez, vol. 31-1, , p. 77-83. (DOI 10.3406/casa.1995.2729)

Articles connexes

  • Histoire de Gibraltar
  • Écoumène
  • Plus ultra

Liens externes

  • Compte-rendu de l'ouvrage de S. Frau sur la situation géographique des colonnes d'Hercule dans l'Antiquité grecque publié dans Diogène.