La percolation (du latin percolare, « filtrer », « passer au travers ») désigne communément le passage d'un fluide à travers un milieu poreux ou fissuré plus ou moins perméable. Un exemple de la vie courante est celui de l'écoulement de l'eau au travers de la poudre de café moulu contenu dans le filtre d'une machine à café (d'où le nom de percolateur).
Ce terme a aussi un sens plus précis en physique et en mathématiques : c'est un processus physique critique qui décrit, pour un système, une transition d'un état vers un autre. C'est un phénomène de seuil associé à la transmission d'une « information » par le biais d'un réseau de sites et de liens qui peuvent, selon leur état, relayer ou non l'information aux sites voisins.
Histoire
Vers 1800, le Français Jean Baptiste de Belloy, ancien évêque de Marseille et bientôt archevêque de Paris (1801), invente le système de la percolation du café, auparavant infusé, ainsi son dubelloire ou sa débelloire devient la première cafetière.
En 1856, Henry Darcy formule « la loi de Darcy » dans l'appendice D de son ouvrage Les fontaines publiques de la ville de Dijon[1], où il traite de la perméabilité d'un sol en fonction de la hauteur d'eau. Son étude ne concerne cependant que des milieux perméables, et aucun effet de seuil n'est mis en évidence.
Le phénomène de seuil est étudié pour la première fois en 1957 par Simon Broadbent et John Hammersley qui cherchent à comprendre comment les masques à gaz des soldats deviennent inefficaces[2]. Le terme de « percolation » vient du phénomène analogue qu'est le passage non plus d'un gaz, mais de l'eau à travers le percolateur de la machine à café qui est un filtre au même titre que le masque à gaz[3].
Broadbent et Hammersley en généralisent le sens à la transmission, ou non, d'une « information » par un réseau de sites et de liens. Dans le cas particulier de la physique des fluides, l'information est le fluide (eau ou gaz), et les sites sont les pores du filtre qui relayent l'information s'ils ne sont pas bouchés.
Percolation quantifiant la perméabilité
Géologie et pédologie
En pédologie, la percolation est un écoulement d'eau dans la couverture pédologique perméable, sous l'effet de la gravité[4]. La loi de Darcy décrit le lien entre hauteur d'eau et vitesse de percolation, par exemple dans le cas d'une eau de surface qui alimente une nappe phréatique. Mais cette loi décrit la perméabilité du milieu en fonction de la quantité d'eau, sans prendre en compte un effet de seuil.
La percolation de l'eau à travers les sols est notamment étudiée dans le cadre de l'écologie urbaine. Il s'agit de limiter les inondations et subséquemment les sécheresses.
Préparation de boissons
Le café peut être obtenu par percolation, en utilisant un percolateur où l'eau se fraye un chemin entre les particules de café[4]. C'est la méthode utilisée dans la préparation de l'expresso[5].
Dans l'hôtellerie, le thé infusé est obtenu par percolation sous haute pression.
Approches théoriques de la percolation
Théorie de la percolation
Cette théorie initiée par Broadbent et Hammersley définit une probabilité critique pc et les régimes associés (sous-critiques, critiques et sur-critiques) de connecter des points en un amas de taille infinie. Une des applications de la théorie de la percolation est l'étude des feux de forêts (et, de façon proche, la propagation des épidémies[2]).
Théorie des systèmes dynamiques
La théorie des systèmes dynamiques et celle de la percolation convergent sur la notion de « fragilité » : plus un système est fragile (c'est-à-dire qu'il peut subir des changements brusques d'un état à un autre), plus il peut être assimilé à une structure poreuse, perméable et manquant de rigidité. La percolation permet alors de juger du seuil critique de transformation de ce système.
En théorie des systèmes dynamiques, la percolation est donc le passage d'un système d'un état (ou une phase) vers un état inférieur et moins performant (entropie) ou supérieur et plus performant (auto-organisation, néguentropie). Cette mutation se produit soit de façon soudaine et abrupte, soit en passant par une « phase de transition » plus ou moins indécise et plus ou moins chaotique ou au contraire peu active (stase).
Autres
La théorie de la percolation peut aussi être utilisée en économie, en écologie (pour étudier des migrations), en sociologie, etc.[6].
Notes et références
- ↑ Henry Darcy, Les fontaines publiques de la ville de Dijon : exposition et application des principes à suivre et des formules à employer dans les questions de distribution d'eau, Paris, Victor Dalmont, (lire en ligne).
- 1 2 Article La percolation, un jeu de pavages aléatoires de Hugo Duminil-Copin pour Images des Maths et Pour la science.
- ↑ L'origine étymologique est reprise dans la thèse « Percolation et économie » de Stéphane Pajot, 2001 (lien pérenne : http://www.theses.fr/2001NANT4007).
- 1 2 « Percolation », sur Futura Planète (consulté le ).
- ↑ (en) M. Petracco, « Percolation », dans Espresso coffee: the science of quality, Academic Press, .
- ↑ Voir l'article Théorie de la percolation.
Voir aussi
Articles connexes
- Osmose
- Effet de seuil
- Algorithme de Hoshen-Kopelman
- Théorie de la percolation
Liens externes
- La percolation sur le site OpenClassrooms
- Article La percolation, un jeu de pavages aléatoires de Hugo Duminil-Copin pour Images des Maths et Pour la science.
- Exemples de percolation dans la thèse de Stephane Pajot
- Percolation et économie : Modèles de percolation et apports de la percolation à la théorie économique
- Propriétés remarquables de pions sur un hexiquier par Edouard Rodrigues: Il existe non pas toujours une seule chaîne traversant un pavage hexagonal mais il existe toujours 2 chaines traversant un pavage hexagonal quelconque.