Les actes de capitulation du Troisième Reich sont constitués par les deux versions de l’Acte de reddition militaire — en anglais : Act of military surrender — qui constituent le texte légal de la capitulation du Troisième Reich par lequel le Haut Commandement des forces armées allemandes s'est rendu de manière simultanée sans condition aux hauts commandements suprêmes des forces expéditionnaires alliées en Europe et de l'Union soviétique, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, en Europe. La première capitulation a été signée à Reims le à 2 h 41, la seconde à Berlin le 8 mai 1945 à 22 h 43, heure de Berlin, soit le à 0 h 43, heure de Moscou[alpha 1].
Première capitulation
La délégation allemande est composée du Generaloberst Alfred Jodl, du Generaladmiral von Friedeburg et du Major Wilhelm Oxenius. Le à 2 h 41, dans une salle du « Collège technique et moderne » de Reims (actuel musée de la Reddition) qui était alors occupée par l'état-major du général Eisenhower, est signée la reddition sans condition des forces armées allemandes par Alfred Jodl, au nom du Haut Commandement des forces armées (en allemand : Oberkommando der Wehrmacht) et en tant que représentant du nouveau Reichspräsident, successeur de Hitler, le Großadmiral Karl Dönitz.
Le document, rédigé en quatre langues, est signé pour le SHAEF par le général Walter B. Smith, chef d’état-major du général Eisenhower qui signe au nom des Alliés occidentaux, et par le général Ivan Sousloparov, seul représentant de l'Union soviétique à Reims et commandant la mission de liaison militaire. Le général français François Sevez, convoqué in extremis, est invité à le contresigner comme témoin en tant que chef d'état-major du général de Gaulle. Le texte en anglais était le seul texte faisant autorité[1].
L'étendue des pouvoirs dont est investi le général Susloparov n'est pas vraiment claire et il ne dispose d'aucun moyen de contacter rapidement le Kremlin. Il prend néanmoins le risque de signer pour la partie soviétique. Il fait noter cependant que le document pourrait être remplacé dans le futur par une nouvelle version (voir l'article 4). Staline se révèle très mécontent de la tournure de l'événement. Il exige que la capitulation allemande ne puisse être acceptée qu'en présence d'un représentant du Haut Commandement des forces de l'Union soviétique et il insiste pour que le protocole de Reims ne soit considéré que comme un préliminaire à la cérémonie officielle qui se tiendrait à Berlin en présence du maréchal Joukov[2].
Texte de l'acte de capitulation du 7 mai 1945 à Reims
(traduction française)
Seul le texte en anglais fait autorité
1. Nous soussignés, agissant au nom du Haut Commandement allemand, déclarons par la présente que nous offrons la reddition sans condition au Commandant suprême des Forces expéditionnaires alliées et, simultanément au Haut Commandement soviétique, de toutes les forces de terre, de mer et de l'air qui sont à cette date sous contrôle allemand.
2. Le Haut Commandement allemand transmettra immédiatement à toutes les autorités militaires navales et aériennes allemandes et à toutes les autorités militaires sous contrôle allemand, l'ordre de cesser de prendre part aux opérations actives à 23 h 1 heure d'Europe centrale le et de rester sur les positions qu'elles occuperont à ce moment. Aucun navire ni avion ne sera sabordé et aucun dégât ne sera fait à leur coque, à leurs machines ou à leur équipement.
3. Le Haut Commandement allemand adressera immédiatement aux commandants des forces intéressées tous les ordres donnés par le Commandant suprême des Forces expéditionnaires alliées et par le Haut Commandement soviétique, et s'assurera de leur exécution.
4. Cet acte de reddition militaire ne préjuge pas de l'avenir et sera remplacé par tout autre instrument général de reddition qui sera imposé par ou au nom des Nations unies et applicable à l'ALLEMAGNE et aux forces armées allemandes dans leur ensemble.
5. Dans le cas où le Haut Commandement allemand ou certaines forces sous son contrôle manqueraient d'agir conformément à cet acte de reddition, le Commandant suprême des Forces expéditionnaires alliées et le Haut Commandement soviétique prendront toutes actions punitives ou autres qu'ils jugeront appropriées.
Signé à Reims France à 2 heures 41, le .
Au nom du Haut Commandement allemand.
- Signature du général Jodl
Au nom du Commandant suprême des Forces expéditionnaires alliées
- Signature du général Bedell-Smith
Au nom du Haut Commandement soviétique,
- Signature du général Sousloparov
Général, Armée française (Témoin)
- Signature du général Sevez
Seconde capitulation
Le peu avant minuit, la seconde capitulation allemande est signée[3] à Karlshorst, en banlieue sud-est de Berlin, dans une villa qui abrite aujourd'hui le musée germano-russe[4]. Les représentants de l'URSS, de la Grande-Bretagne, de la France et des États-Unis arrivent peu avant minuit. Après l’ouverture de la cérémonie par le maréchal Joukov, les représentants du Haut Commandement allemand, emmenés par le Generalfeldmarschall Keitel, sont invités à signer l'acte de capitulation entrant en vigueur le à 23 h 1, heure d'Europe centrale, soit le à 1 h 1 à l’heure de Moscou : ceci explique pourquoi la victoire est célébrée le 9 mai, au lieu du 8, dans les pays de l'ex-URSS, notamment en Russie.
Texte de l'acte de capitulation du 8 mai 1945 à Berlin
(traduction en français à partir du texte original en anglais)
1. Nous, soussignés, agissant au nom du Haut Commandement allemand, déclarons par la présente que nous présentons la reddition sans condition, au commandant en chef de la Force expéditionnaire alliée et simultanément au Haut Commandement suprême de l'Armée rouge, de toutes les forces terrestres, navales et aériennes qui sont à ce jour sous contrôle allemand.
2. Le Haut Commandement allemand transmettra immédiatement l'ordre, à toutes les autorités militaires terrestres, navales et aériennes allemandes et à toutes les forces sous contrôle allemand, de cesser leurs actions de combat à 23 h 1 de l’Europe centrale le , de rester sur les positions qu'elles occupaient à ce moment et de se désarmer complètement, remettant leurs armes et équipements aux commandants alliés ou aux officiers locaux désignés par les représentants des commandements suprêmes alliés. Aucun bateau, navire ou avion ne doit être sabordé, ou aucun dommage ne doit être fait à leur coque, machines ou équipement, ainsi qu'aux machines de toutes sortes, aux armements, appareils et à tous les moyens techniques permettant la poursuite de la guerre en général.
3. Le Haut Commandement allemand transmettra immédiatement aux commandants concernés tous nouveaux ordres publiés par le commandant en chef de la Force expéditionnaire alliée et par le Commandement suprême de l'Armée rouge, et il s'assurera de leur bonne exécution.
4. Cet acte de reddition militaire ne tient pas compte de tout éventuel nouvel acte de reddition général imposé par les Nations unies ou en leur nom et applicable à l'ALLEMAGNE et aux forces armées allemandes dans leur ensemble, lequel nouvel acte remplacera le précédent.
5. Si le Haut Commandement allemand ou toute force sous son contrôle n’agissaient pas selon les termes de cet acte de reddition, le commandant en chef de la Force Expéditionnaire Alliée et le Haut Commandement suprême de l'Armée rouge exerceraient toutes actions punitives ou autres comme ils le jugeraient opportun.
6. Le présent acte est établi en anglais, russe et allemand. Seuls les textes anglais et russe font foi.
Signé à Berlin, le .
Keitel[alpha 2]
von Friedeburg[alpha 3]
Stumpff[alpha 4]
Pour le Haut Commandement allemand
Air chief marshal A. W. Tedder
Au nom du commandant en chef de la Force expéditionnaire alliée
G. Joukov
Au nom du Haut Commandement suprême de l'Armée rouge
À la signature étaient également présents comme témoins :
J. de Lattre de Tassigny,
Général commandant en chef de la 1re armée française
Carl Spaatz
Général, commandant des Forces stratégiques aériennes des États-Unis.
Commémoration
Cet événement fait l'objet en France de commémorations, avec une cérémonie à l'Arc de Triomphe, en haut des Champs-Élysées à Paris. En 1975, le président Valéry Giscard d'Estaing les avait supprimées au titre du rapprochement avec l'Allemagne dans le cadre européen[5]. Par la suite, elles ont été rétablies en 1981 par le président François Mitterrand. Depuis une loi d', un jour férié dans tout le pays et ces cérémonies ne sont plus remises en cause.
En 2007, le président Jacques Chirac a pris ce jour-là « l'un de ses ultimes bains de foule présidentiels »[6], en l'absence remarquée de son successeur Nicolas Sarkozy. L'année suivante, ce dernier a commémoré, sur une plage du Débarquement en Normandie, le 63e anniversaire[7]. Deux présidents côte à côte, Nicolas Sarkozy et François Hollande, le second venant de battre le premier à l’élection présidentielle, ont présidé ensemble la cérémonie de commémoration de 2012[8] qui a vu « le dernier bain de foule pour Sarkozy »[8], parti « saluer les badauds »[8], venus lui dire un dernier « Au revoir », mais deux ans après, la faible affluence est remarquée comme un « flop » révélant un président désormais « décidément bien impopulaire »[9]. En 2018, l'absence de François Hollande, ex-président, est également « remarquée »[10]. L'année suivante, malgré la pluie, le chef de l'État avait été saluer la foule[11]. En 2020 et 2021, elles ont été annulées pour cause de COVID-19[12]. En 2023, les Champs-Élysées sont quasi vides après la mise en place d'un large périmètre de sécurité pour empêcher les opposants à la réforme des retraites de venir manifester et perturber la cérémonie[13].
Notes et références
Notes
- ↑ Cette différence de fuseau horaire, représentant un écart de deux heures, explique que l’événement soit commémoré en Russie le 9 mai.
- ↑ En tant que chef du Haut Commandement de la Wehrmacht (en allemand : Chef des Oberkommandos der Wehrmacht) et en tant que représentant de la Heer, en français : « l’Armée de terre ».
- ↑ En tant que commandant en chef (en allemand : Oberbefehlshaber) de la Kriegsmarine.
- ↑ En tant que représentant de la Luftwaffe.
Références
- ↑ Christian Delporte, Les Médias et la Libération en Europe : 1945-2005, Éditions L'Harmattan, , p. 11.
- ↑ The Memoirs of Georgy Zhukov.
- ↑ Earl F. Ziemke, chapitre XV : The Victory Sealed, p. 258, dernier paragraphe.
- ↑ (en) (de) (ru) Deutsch-Russisches Museum Berlin-Karlshorst.
- ↑ 20 Minutes avec AFP le 08/05/13
- ↑
- ↑ La Dépêche
- 1 2 3 Fabienne Cosnay, Europe1, le 8 mai 2012
- ↑ La Libre Belgique le 8 mai 2014
- ↑
- ↑ Adrien Gaboulaud pour Paris-Match avec AFP le 08/05/2019
- ↑ par Simon Louvet pour Actu.fr le 8 mai 2021
- ↑ RTBF
Annexes
- (en) German Instrument of Surrender (Wikisource anglophone).
Bibliographie
- (en) Earl F. Ziemke, « The U.S. Army in the occupation of Germany 1944-1946 », Cenrer of Military History, United States Army, Washington, D. C., 1990, Library of Congress Catalog Card Number 75-619027.
- (ru) The Memoirs of Georgy Zhukov. Chapter 22: Unconditional Surrender of Nazi Germany.
- Maurice Vaïsse (dir.), « Une capitulation sans conditions pour l’Allemagne : 7, 8 et 9 mai 1945, la Paix », Historia Spécial, Paris, Historama, vol. 35 « Il y a cinquante ans : la capitulation de l’Allemagne », no 35, , p. 10-17.
Articles connexes
- Commission consultative européenne
- Fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe
- 8 mai 1945
- Musée de la Reddition à Reims