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En musique, une altération peut avoir trois significations. Elle renvoie tout d'abord à la modification de la hauteur initiale d'une note, en d'autres termes, au fait de rendre cette note plus grave ou plus aiguë, et ce, quelles que soient les raisons de ce changement : modulation, transposition, ornementation... Ensuite, sur la partition, et plus précisément, sur la portée, une altération désigne le symbole chargé d'indiquer cette modification. Enfin, et par extension, il est également possible de considérer qu'une altération représente la nouvelle note ainsi modifiée, autrement dit, la « note affectée d'une altération ».

En tant que figure indiquant la modification de la hauteur initiale d'une note, l'altération se place sur la portée, très précisément sur la ligne ou dans l'interligne, à gauche de la note qu'elle affecte.

Différentes figures d'altérations

On distingue les altérations simples et les altérations doubles, les premières étant les plus courantes.

Altérations simples

Altérations simples.

Elles sont au nombre de trois : le dièse, le bémol et le bécarre.

  • Le dièse (dièse) est l’altération qui élève la note d'un demi-ton chromatique.
  • Le bémol (bémol) est l’altération qui abaisse la note d'un demi-ton chromatique.
  • Le bécarre (bécarre) annule l’effet de toutes les altérations précédentes (qu’elles soient simples ou doubles, constitutives ou accidentelles) et rend à une note sa hauteur naturelle.

Le mot dièse provient du grec diesis qui, à l’époque de la Grèce antique, avait à peu près le même sens. Jusqu'au XVIe siècle, le dièse et le bécarre étaient confondus sous la même appellation « bécarre ». Le dièse est issu du bécarre par prolongement partiel des deux hampes verticales. Il était alors plus incliné qu'aujourd'hui.

L’origine des mots bémol et bécarre remonte au Moyen Âge, et se rapportent à la note si, qui fut la première à être affectée d’un bémol dans certaines circonstances. C’est ainsi que bémol signifie étymologiquement B mou — c’est-à-dire, si arrondi, désignant l’actuel si bémol —, et bécarre, B carré (désignant à son tour le si naturel).

Altérations doubles

Altérations doubles usuelles

Il existe deux altérations doubles en solfège moderne : le double dièse et le double bémol.

  • Le double dièse ( ) est l'altération qui élève la note de deux demi-tons chromatiques.
  • Le double bémol ( ) est l'altération qui abaisse la note de deux demi-tons chromatiques.

Dans un but d'exhaustivité, mentionnons qu'il a aussi existé trois autres altérations doubles, aujourd'hui tombées en désuétude, car le bécarre initial qu'ils contiennent est considéré comme superflu : le double bécarre, le bécarre-dièse et le bécarre-bémol.

Altérations doubles désuètes
  • Le double bécarre ( ) était l'altération qui rendait sa hauteur primitive à une note doublement diésée ou doublement bémolisée — c'est-à-dire affectée d'un double dièse ou d'un double bémol. Aujourd'hui, par définition, un bécarre seul suffit.
  • Le bécarre-dièse ( ) était l'altération qui changeait une note doublement diésée en une note simplement diésée. Aujourd'hui, un dièse seul suffit.
  • Le bécarre-bémol ( ) était l'altération qui modifiait une note doublement bémolisée en une note simplement bémolisée. Aujourd'hui, un bémol seul suffit.

Effet des altérations

L'effet d'une altération est différent suivant que celle-ci se trouve dans le morceau — altération accidentelle — ou bien à la cléaltération constitutive.

Il convient de remarquer qu'une note altérée est nommée avant son altération, mais est notée après. Par exemple, un do affecté d'un dièse sera appelé « do dièse», mais, sur la partition, le dièse sera écrit avant le do — « dièse do», en somme —, ceci, afin d'éviter de jouer par erreur un do avant de réaliser que c'était en fait un do dièse qu'il eût fallu jouer.

Altérations accidentelles

Une altération accidentelle — appelée plus simplement accident — intervient dans le courant du morceau, et concerne toutes les notes de même nom et de même hauteur qui se trouvent après elle dans la même mesure. L'effet de l'altération accidentelle est donc temporaire et prévaut sur toute altération précédente affectant la note.

Exemple :

\relative c' {
  \override Voice.TextScript #'staff-padding = #3
  \override Staff.TimeSignature #'stencil = ##f
  \time 6/1
  f1_"1" fis_"2" f'_"3" fis,_"4" f_"5" fis_"6"
  f_"7" fis'_"8" f,_"9"
}
Dans l'exemple ci-dessus, le premier dièse accidentel affecte les notes 2 et 4, mais pas la note 3, qui n'est pas à la même hauteur que la note 2, objet de l'altération accidentelle. Le bécarre accidentel affecte la note no 5 qui redevient donc un fa naturel. Le deuxième dièse accidentel affecte la note 6, mais la note 7 qui est dans une autre mesure, n'est pas affecté et reste un fa naturel. Le troisième dièse accidentel affecte la note 8 mais pas la note 9 car, pour la même raison que la note 2 précédemment, n'est pas à la même hauteur que le dièse accidentel. La séquence se lit donc : fa, fadièse, fa, fadièse, fa, fadièse, fa, fadièse, fa.

Altérations de précaution

  • En principe, on peut ainsi considérer que la barre de mesure annule l'effet de tous les accidents qui ont précédé.
Certains compositeurs (arrangeurs, éditeurs, copistes, graveurs) toutefois, pour éviter toute ambiguïté et sachant par expérience que « deux précautions valent mieux qu'une », rajoutent, après la barre de mesure et devant la note concernée, l'altération (entre parenthèses ou non) rétablissant la hauteur initiale d'une note donnée qui avait été modifiée accidentellement au cours d'une mesure précédente. Une telle altération accidentelle, qui n'est pas absolument indispensable, est alors appelée « altération de précaution », justement. Dans l'exemple ci-dessous, l'altération de précaution est notée entre parenthèses. Il s'agit ainsi de rappeler à l'interprète que le troisième mi ne doit plus être altéré, car l'accident de la mesure précédente (un bémol à hauteur du mi4), comme tout accident, n'a d'effet que jusqu'à la fin de la mesure où il a été placé.
  • Cette règle comporte une petite exception toutefois. Lorsque deux notes, de même hauteur et affectées du même accident, sont réunies par une liaison de prolongation, et qu'une barre de mesure passe entre les deux notes en question, on n'écrit pas l'altération devant la seconde note. Si la même note est écrite dans cette deuxième mesure, elle reste altérée jusqu'à la prochaine barre de mesure (sauf indication contraire). Dans notre exemple, la deuxième note de mi, pourtant après la barre de mesure, est toujours bémolisée, du fait de la liaison de prolongation.

\relative c'' {
g c d d8 ees ~
ees d c a
e' d c a
}

Altérations constitutives

Une altération constitutive est valable durant toute la portée, pour toutes les notes de même nom — même de hauteur différente, cette fois —, sauf si entretemps intervient un accident modifiant la hauteur de la note en question.

  • Exemple :

\relative c' {
  \override Voice.TextScript #'staff-padding = #3
  \key ees \major
  \override Staff.TimeSignature #'stencil = ##f
  \time 6/1
  ees1_"1" ees'_"2" ees,_"3" e_"4" ees'_"5" e,_"6"
  ees'_"7" ees,_"8"
}
Dans l'exemple ci-dessus, le mi (bémol constitutif) affecte toutes les notes sauf les notes no 4 et no 6 à cause du bécarre accidentel.
  • Placées au début de la portée, juste après la clé, les altérations constitutives forment ce qu'on appelle une armature, ou armure.

Altérations relatives

Alors qu'en solfège moderne, le signe d'altération exprime une hauteur absolue dans le système musical, jusqu'au XVIIIe siècle elle n'avait de valeur que relative : le cas le plus courant, dans la musique ancienne, est celui des pièces ayant un bémol à la clef (le si ), dans lesquelles un dièse devant un si désigne un si naturel – et non un si dièse, qui n'a guère de sens à cette époque !

Il convient de noter également que dans les partitions anciennes, l'altération accidentelle n'est généralement valable que pour la note qu'elle précède, et non pour toute la mesure.

De plus, l'éditeur moderne d'une partition ancienne peut ajouter au-dessus de la portée, et vis-à-vis d'une note particulière, une altération de « suggestion » (entre parenthèses ou non), c'est-à-dire que l'éditeur propose à l'exécutant une note altérée, alors que cette altération manque dans le texte original (oubli, négligence, etc.).

Notes intermédiaires

Une note intermédiaire est, dans chaque ton de l'échelle diatonique de base, un son ajouté au moyen d'une altération qui divise ce ton en deux demi-tons : c'est ainsi que l'échelle diatonique devient échelle chromatique, que l'on peut définir comme « l'échelle diatonique amplifiée par les notes intermédiaires » :

Echelle diatonique et notes intermédiaires

Remarquons que contrairement à l'échelle diatonique qui ne contient que des tons et demi-tons diatoniques, l'échelle chromatique est exclusivement composée de demi-tons — demi-tons chromatiques, mais aussi, demi-tons diatoniques.

  • Exemple, dans l'octave do/do :
Gamme chromatique

Altérations microtonales

Avec le développement de musiques microtonales – et, notamment, en quarts-de-tons –, de nouvelles formes d'altérations ont été créées. Cependant, il n'existe pas de norme universellement acceptée[1].

Altérations quart-de-tonales

Les quarts-de-tons sont parfois simplement indiqués par des flèches (vers le haut ou vers le bas), par rapport à l'altération conventionnelle en demi-tons. Le schéma suivant indique les formes d'altérations quart-de-tonales qui semblent les plus répandues aujourd'hui.

Altérations en quarts-de-tons

\relative c' {
  \override Score.SpacingSpanner #'shortest-duration-space = #15
  \time 10/4
  \override Staff.TimeSignature #'stencil = ##f
  \override Staff.Clef #'stencil = ##f
  \override Staff.BarLine #'stencil = ##f
  \set Staff.extraNatural = ##f
  \override Voice.TextScript #'padding = #1.7
  %\override Voice.TextScript #'color = #blue
  \textLengthOn
  s
  feses^\markup { \center-align "−1 ton" }
  feseh^\markup { \center-align "−¾ ton" }
  fes^\markup { \center-align "−½ ton" }
  feh^\markup { \center-align "−¼ ton" }
  %\once \override Voice.TextScript #'color = #red
  f
  fih^\markup { \center-align "+¼ ton" }
  fis^\markup { \center-align "+½ ton" }
  fisih^\markup { \center-align "+¾ ton" }
  fisis^\markup { \center-align "+1 ton" }
}

Cependant, si celles correspondant aux demi-dièse et dièse-et-demi paraissent bien acceptées, on trouve, parmi les compositeurs, une plus grande variété de formes pour écrire le demi-bémol et le bémol-et-demi.

Altérations barrées

  • Le bémol barré représente le demi-bémol, utilisé pour baisser la note d'un quart de ton.

Cette forme de demi-bémol semble être consacrée par l'usage, depuis le XXe siècle, dans la notation des maqâmat des musiques arabes.

  • Le dièse barré représente le demi-dièse, utilisé pour élever la note d'un quart de ton.

Autres altérations microtonales

On trouve de multiples systèmes d'altérations microtonales :

  • Ohana note simplement l'altération d'un tiers-de-ton ascendant par « / » devant la note ; de deux tiers-de-ton par « // ».
  • Dans un contexte d'intonation pure, « / » et « // », mais aussi « \ » et « \\ » peuvent indiquer une altération d'un ou de deux (etc.) comma(s) syntonique(s), vers le haut ou vers le bas (par rapport à un référentiel pythagoricien)[2].
  • À partir de ses altérations quarts-de-tonales, Wyschnegradky conçoit un système cohérent d'altérations au 12e de ton (en rajoutant à chacune « / » ou « // » pour les hausser d'un ou de deux douzième(s) de ton[3].
  • Cette même échelle (tempérament égal divisant l'octave en 72) a vu récemment fleurir la notation « sagittale »[4].
  • Ligeti note les harmoniques naturels des cors, par des altérations fléchées (indiquant, de manière approximative, l'éloignement d'avec la note du tempérament égal).

Notes et références

  1. Cf. le tableau des altérations microtonales, in Franck Jedrzejewski, Dictionnaire des musiques microtonales, article « Notations », éd. L'Harmattan, 2004 (ISBN 978-2747555760)
  2. Zarlino
  3. http://users.bigpond.net.au/d.keenan/sagittal/gift/Image6.gif
  4. Sagittal microtonal notation

Bibliographie

  • Adolphe Danhauser, Théorie de la musique : Édition revue et corrigée par Henri Rabaud, Paris, Henry Lemoine, , 128 p. (ISMN 979-0-2309-2226-5)
  • Claude Abromont et Eugène de Montalembert, Guide de la théorie de la musique, Librairie Arthème Fayard et Éditions Henry Lemoine, coll. « Les indispensables de la musique », , 608 p. [détail des éditions] (ISBN 978-2-213-60977-5)

Voir aussi

Articles connexes

  • Représentation des symboles musicaux en informatique

Liens externes