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Maître Eckhart
Représentation de Maître Eckhart par Andrea di Bonaiuto, détail de la fresque Via Veritas dans la chapelle des Espagnols de Santa Maria Novella, Florence, v. 1365.
Naissance
Prob. 1260
Hochheim (Thuringe), Drapeau du Saint-Empire Saint-Empire romain germanique
Décès
1327 ou 1328
Prob. Avignon, Comté de Provence
Formation
École/tradition
Scolastique et mystique rhénane
Principaux intérêts
Idées remarquables
filiation divine, suressentialité
Œuvres principales
Sermons (latins et allemands)Commentaire du Livre de la GenèseCommentaire de l'ExodeCommentaire de l'Évangile de JeanCommentaire du Livre de la SagesseCommentaire des Paraboles de la GenèseLe Livre de la consolation divine.
Influencé par
Aristote, Augustin, Proclus, Pseudo-Denys, Boèce, Avicenne, Averroès, Maïmonide, Alain de Lille, Albert le Grand, Thomas d'Aquin, Hadewijch d'Anvers, Marguerite Porete
A influencé
Suso, Tauler, Nicolas de Cues, Böhme, Angelus Silesius, Hegel, Schopenhauer, Wittgenstein, Jaspers, Heidegger, Michel Henry, Guénon, Coomaraswamy

Eckhart von Hochheim, dit Maître Eckhart, né vers 1260 à Hochheim dans le landgraviat de Thuringe et mort le [Note 1], probablement à Avignon (États pontificaux), est un théologien et philosophe allemand, principal représentant du courant spirituel catholique qu'on a appelé la mystique rhénane.

Après être entré dans l'ordre dominicain, Eckhart fait de longues études de théologie avant de devenir un maître reconnu, enseignant dans plusieurs universités. Il est également un membre influent du clergé.

Bien que condamnée par les autorités ecclésiastiques de son temps, son œuvre, écrite à la fois en latin (enseignement universitaire) et en allemand (traités et sermons), a eu une influence considérable sur la pensée chrétienne.

Biographie

Maître Eckhart est né en 1260 environ à Hochheim, en Thuringe, état du Saint-Empire romain germanique. Il entre au couvent dominicain d'Erfurt en 1275[1]. Il fait peut-être des études d'arts à Paris. Il étudie la théologie au studium generale de Cologne, récemment fondé par Albert le Grand, vers 1280. Il commente les Sentences de Pierre Lombard à Paris en 1293-1294, comme l'usage le voulait dans les universités de l'époque.

À partir de 1294, il devient prieur d'Erfurt et vicaire de Thuringe. Chargé de l’encadrement des frères novices, il réunit quelques-unes des vespera, questions délicates abordées le soir, sous la forme de débat, sous le nom d'Entretiens spirituels (ou Instructions spirituelles suivant la traduction)[1].

Il enseigne à Paris en 1302-1303[1]. Dans la marge d'un manuscrit du franciscain Gonzalve d'Espagne, on trouve son nom cité. Une dispute intellectuelle entre les deux théologiens pourrait avoir eu lieu au sujet de la primauté ou non de l'être sur l'intellect, et sera source de débats.

N’ayant pas signé la pétition de Philippe IV le Bel contre le pape Boniface VIII, il est expulsé du royaume de France (et de ses États vassaux) le . Il est néanmoins nommé premier prieur provincial de Saxe par le chapitre général tenu à Toulouse en 1303 en son absence[1].

Il est ensuite nommé vicaire général de la province de Bohême au chapitre de Strasbourg en 1306, dans le contexte des problèmes posés par certaines béguines exaltées, proches des idées d'un groupe parfois nommé Libre-Esprit, mais dont nous ne possédons que des mentions vagues dans des mises en garde contre l’hérésie par les autorités ecclésiastiques.

Il exerce comme maître à Paris au studium de l'Université en 1311-1313[1]. Il entreprend une « somme théologique » de forme inédite (œuvre tripartite) avec une ambition encyclopédique[1]. Vers 1314, il est promu vicaire général de Teutonie[Note 2], résidant à Strasbourg[1]. Puis il préside le studium de Cologne à partir de 1324.

Démêlés avec les autorités ecclésiastiques

En 1325, une enquête diligentée par l'archevêque de Cologne, Henri II de Virnebourg, expose les premiers soupçons sur son orthodoxie. Maître Eckhart défend sa doctrine avec l'appui de son ami Nicolas de Strasbourg.

L'année suivante, un dominicain et un franciscain dénoncent certaines de ses propositions à l'Inquisition. Ses deux dénonciateurs seront poursuivis pour calomnie, désobéissance et diverses autres fautes qui leur valurent d'être arrêtés et maintenus en cellule fermée. Il est actuellement reconnu qu'ils ne possédaient pas les connaissances nécessaires pour critiquer un maître et que la jalousie devant sa popularité fut un des premiers moteurs de leur démarche. Il n’est pas exclu qu’ils furent manipulés par Virnebourg et Jean de Dürbheim, évêque de Strasbourg. Contre son gré et contrainte de suivre la procédure engagée, la hiérarchie de l'ordre dominicain est tenue de donner une suite juridique à cette dénonciation. Dans ce cadre, a lieu l'instruction d'un procès en 1327, se basant sur des citations de Maître Eckhart « sorties de leur contexte et tronquées », selon Marie-Anne Vannier.

La procédure lancée contre lui est dite Pro movente : en ce cas, le prévenu ne bénéficie d'aucune présomption d'innocence et doit se justifier. Cette procédure est théoriquement sans appel possible. Pourtant, appuyé par ses confrères dominicains Nicolas de Strasbourg et Jean de Dambach, il interjette en appel devant le pape et cet appel est accepté, à rebours du droit canonique. Les motifs de cet abus de droit ne sont pas bien connus, mais il semble que l'inquisition pontificale tenait à s'occuper personnellement de la condamnation de Maître Eckhart.

Celui-ci doit alors se rendre à Avignon, dans un contexte de purges disciplinaires dans l'Église (Michel de Césène, Bonagrazia de Bergame et Guillaume d'Ockham sont convoqués à la même époque et inquiétés pour leurs activités). Le cardinal Jacques Fournier, futur pape Benoît XII, mène l’instruction, au nom du pape Jean XXII. Jacques Fournier avait par ailleurs rédigé un traité intitulé Contra Errores Magistri Eckhardi, dont ne possédons aujourd’hui que de courts extraits, mais qui sont suffisants pour y retrouver le fond et la forme de la condamnation finale.

Maître Eckhart comparaît libre. Tout comme il avait répondu à ses détracteurs à Cologne en 1327, il entreprend de se défendre mais meurt avant la fin du débat. Un courrier, entre Jacques Fournier et Henri de Virnebourg, annonce la prochaine condamnation d’Eckhart et son décès, sans indication de lieu ou de date. C’est le seul document valide et attesté qui traite de son décès. Il était donc décédé depuis un ou plusieurs mois, avant sa condamnation par la bulle In Agro Dominico, datée du .

Jugement de l'Église

Cette bulle, signée par le pape mais rédigée en grande partie par Jacques Fournier, énumère vingt-huit thèses extraites ou prétendument extraites des œuvres latines et des prédications allemandes de Maître Eckhart[2]. Les propositions y sont jugées critiquables sur la forme, pour dix-sept d’entre elles, et malsonnantes pour les autres[3].

Chaque proposition a été ou réfutée ou replacée en son contexte par Maître Eckhart dans le débat où il a pu exposer sa défense. Le procès d’Eckhart a fait l’objet de plusieurs études évoquant des hypothèses plausibles concernant son déroulement. Ces rejets sur la forme, bien que ne donnant lieu à aucune sanction, se traduiront par une sorte de damnatio memoriae. D’autres auteurs, Jean de Sterngassen, Zerbolt van Zutphen, ont tenté de rendre explicite ce qui n'avait pas été explicitement formulé comme irrecevable dans la bulle[4]. Un changement profond de pensée est en germe. Nicolas de Cues, qui est à la jonction entre le Moyen Âge et la Renaissance, fera recopier à son usage des textes majeurs de Maître Eckhart pour les inclure dans ses propres écrits. Car, même si une bulle lui est adressée, la pensée de Maître Eckhart est bien dans la pure tradition augustinienne et témoigne de l’autorité croissante de la pensée de Thomas d’Aquin. La synthèse eckhartienne, présentée dans le Prologue à l’Œuvre Tripartite — sa grand œuvre dont nous ne posédons qu’une partie — cherche à éviter de répèter ce qui a déjà été admis pour se pencher sur ce qui, en théologie, demeure « rare et précieux ».

Par conséquent, en 1992, une demande de réhabilitation de Maître Eckhart fut soumise par le chapitre général dominicain à l'Église, sous Jean-Paul II. Elle est acceptée par le cardinal Ratzinger, préfet du Dicastère pour la Doctrine de la Foi et futur Benoît XVI, qui déclare que la réhabilitation d'Eckhart « n'a pas lieu d'être », car il n’est pas condamné. Telle est, en bref, la réponse officielle que le maître de l'ordre, Timothy Radcliffe, reçut du Vatican en 1992, et qu’il a résumée ainsi dans une lettre datée du à Peter Talbot Wilcox, alors président de la British Eckhart Society : « Nous avons essayé de faire lever la censure qui pesait sur Eckhart. On nous a répondu qu'en réalité ce n'était pas nécessaire, car il n'a jamais été condamné en son nom propre, et que c'est seulement le cas pour certaines de ses propositions ; par conséquent, nous sommes parfaitement libres de dire que c'est un bon théologien orthodoxe[5]. »

Système de pensée

La pensée de Maître Eckart est certes un mysticisme, mais un mysticisme spéculatif. En ce sens, elle ne propose aucun embrasement émotionnel à l'imagination, mais une recherche rigoureuse de la vérité dans les cadres de la pensée scolastique, qui prolonge le «Fides quaerens intellectum » d’Anselme de Cantorbéry[6]. Il est à noter que des éditions d’études centenaires, n’étant plus soumises à aucun droit d’auteur, sont actuellement republiées, présentant, sur ce point, comme étant nouvelles des hypothèses invalidées depuis un siècle.

Les débats sur l’impact de Platon ou d'Aristote n’ont plus cours désormais sinon dans l’histoire de la recherche. Les derniers feux de la réduction à la philosophie ontologique, portés par Alain de Libera ou Burkhart Mojsiches, sont les marqueurs d’études datées des années 1980-2000. La traduction de l’Œuvre latine et son étude a invalidé ces éléments : Maître Eckhart ne se situe pas comme un philosophe au sens actuel de ce terme. Les textes découverts jusque dernièrement n’était pas accessibles à ces érudits, en leur temps.

La question de l’Un chez Eckhart est désormais maîtrisée. Car Maître Eckhart est catégorique : l’Un est celui de Dieu, de la Trinité. Ce champ n’est pas accessible à la philosophie et encore moins aux penseurs antiques grecs, dont la logique seule sert l’argumentaire. Et même sur ce point, Eckhart souligne que l’un ne qualifie pas Dieu qui n’est qualifiable que par lui-même, non par une divinité (Gottheît dans l’œuvre allemande) :

De la même façon que la définition du détachement avait occulté l’étude de l’amour, l’étude de l’Un dans la pensée eckhartienne a laissé peu de place à son étude de la théologie trinitaire. L’œuvre latine récuse toute vision moniste d’Eckhart. La réunion de ces deux termes est placée par Eckhart sous l’égide de la négation : « Or Dieu est proprement retranché de tout nombre. Il est en effet un sans unité, traîne sans trinité, tout comme bon sans qualité […]. Il est au-dessus de tout nom, de toute raison, de toute intelligence, et au-dessus de l’Être et de l’étant, dont la différentiation est le nombre, et au-dessus de toutes choses de ce genre-là. Il apparaît qu’il est au-dessus de l’Être et de l’étant en ce qu’il est la cause de l’Être et de l’étant. Explique clairement cela ! » (S. XI, 2)[7].

Ysabel de Andia[8] a affiné la même notion de l’Un et d’un néo-platonisme que Maître Eckhart aurait prolongé via les citations du Pseudo Denys. Or, elle en vient à mettre nettement l’accent sur des différences entre Maître Eckhart et le Pseudo-Denys, dont la première est que la negatio negationis utilisée par Maître Eckhart n’est pas l’aphairesis dionysienne qui, selon le mot déjà ancien de Jean Vanneste[9], est « cette progression de négations bien ordonnées qui monte l’échelle des êtres, du monde sensible au monde de l’intellect avant d’arriver à une apophase totale »  ; la negatio negationis eckhartienne est une affirmation de la puritas essendi divine, dans la lignée augustinienne, exprimée au mieux par l’oxymore, autre formule positive qui englobe une affirmation initiale corrigée par son contraire, son opposé ou son inverse :

« [Dieu] est en effet un sans unité, trine sans trinité ».[10]

Le débat sur une hénologie vaguement théiste semble donc clos depuis longtemps. Marie-Anne Vannier, en introcudtion à la publication de la traduction française du Commentaire du Livre de la Sagesse explique :

Dans ses Sermons et Leçons sur l’Ecclésiastique, Eckhart explique que la sagesse renvoie à la puritas essendi, à la pureté de l’essence, qui correspond au quatrième point de son programme de prédication, tel qu’il le présente dans le Sermon 53. Or, c’est là son point d’orgue : Eckhart passe du détachement à « la pureté de la nature divine », par l’intermédiaire de la petite étincelle de l’âme et, pour évoquer la grandeur de cette puritas essendi, il n’hésite pas à dire dans le Sermon 53 : « de quelle clarté est la nature divine, c’est inexprimable. Dieu est une Parole, une parole inexprimée »[11].

Avec ces pseudo-nouvelles études centenaires, qui ne sont plus reprises par les collectifs de chercheurs universitaires actuels, un retour en arrière vers des systèmes acquiert un vernis de nouveauté et d’autorité. Les publications des nouveaux textes découverts (par exemple les Nouvelles Questions Parisiennes (sous presse) les invalident. Que des publications tombées dans le domaine public soit rééditées sans jamais être mentionnées par les chercheurs universitaires est la preuve que, aujourd’hui encore, Maître Eckhart suscite l’appétit des éditeurs, au détriment de la compréhension, parfois très ardue, de sa pensée.

Enseignements

Le prieuré d'Erfurt

Axe central

L'enseignement spirituel de Maître Eckhart est formulé à partir d'une invitation au détachement de « tout ce qui n'est pas Dieu », selon une expression qu'il emploie souvent. Ce renoncement à toute possession est nécessaire pour l'union à Dieu, et pour la réception de Dieu dans le cœur du disciple. La réception de Dieu en l'âme du croyant — âme libérée, évidée de tout même de l'image de Dieu lui-même, rejoint le thème patristique classique (glosant sur Jean 14, 23) nommé « inhabitation trinitaire » : la Trinité descend dans le fond de l'âme (où l'intellect joue un grand rôle) avec toutes ses propriétés. Ainsi, rendu à nouveau semblable à Dieu, l'homme connaît une déification, nommée théosis dans la tradition grecque. Puisque Dieu est présent avec toutes ses qualités, l'engendrement éternel du Fils par le Père dans l'Esprit se produit désormais dans l'âme humaine. L'enfantement de Dieu dans l'âme, acmé de la vie chrétienne, est le fruit de la « divinisation » reçue de Dieu et par l'union à lui[12].

Précisions

Ce détachement est exprimé sous deux registres.

Le premier a trait à une séparation (Abgeschiedenheit) qui porte à son maximum l'appauvrissement volontaire. Cependant, parce que ce qui est spirituel est supérieur à ce qui est matériel, cette « séparation » est tout d'abord spirituelle et traduite dans un ascétisme chrétien aux accents proches du stoïcisme : l'abondance de citations des auteurs stoïciens en témoigne. Plusieurs auteurs ont considéré cet aspect en parallèle de la recherche de vacuité du bouddhisme : si de nombreuses ressemblances semblent apparaître, ce serait pourtant faire erreur que de rapprocher à outrance une ascèse où le vide désengagé est un but ( dans le bouddhisme) et une recherche d'un désencombrement de soi dans une volonté de ressembler à Jésus-Christ[13]. Le détachement sous cette première forme est à comprendre en fonction d'une théologie de l'homme créé à l'image de Dieu, image dont la ressemblance est perdue. Retrouver la ressemblance suppose de se vider de soi, de se dénuder des images, pour que Dieu entre en soi[14].

Mais le détachement eckhartien est aussi ontologique, à la fois suppression ou annihilation de ce que nous ne sommes pas (« Entbildung » dans les écrits en moyen-haut allemand) et constitution d'un dépassement métaphysique de soi (« Ueberbildung ») : donc un renoncement à tout ce qui rend l'être créé indisponible à l'action de la Grâce ; le dernier degré de ce détachement consistant même à s'affranchir de l'effort pour se rapprocher de Dieu, il conduit à une Gottbildung : déiformation[15].

Il s'agit en effet moins de se décharger du poids de réalités contingentes extérieures que de cultiver et entretenir une intériorité. Ainsi disposé, l'esprit libre, le cœur humble, toute attente ou aspiration personnelle éteinte, l'intériorité insensible à toute turpitude, Dieu ne peut faire autrement que de s'y loger, comblant cette vacuité par la félicité ; « l'homme devenant par Grâce ce que Dieu est en nature. » (Maxime le Confesseur). C'est ce que l'on appelle la divinisation de l'homme, ou en grec la théosis, thème mal connu dans l'Occident chrétien, jugé parfois hétérodoxe, alors que remontant, chez les Pères de l'Église, à Irénée de Lyon, et se prolongeant en de très grands spirituels tels que Nicolas de Cues qui a conservé en sa bibliothèque l'œuvre latine de Me Eckhart. Cet apparent empiètement sur la puissance divine et la suspension du mouvement spontané de la piété ont été les prétextes principaux des accusations d'hérésie, confortées par des énoncés dégagés de leur contexte de prédication, le tout amplifié par le goût de formules paradoxales[16].

Ainsi, contre la tendance générale à l’abandon du monde, Eckhart proclame et justifie théologiquement la possibilité de réintégrer l’identité métaphysique avec Dieu tout en restant dans le monde. Il s'agit d'une formulation chrétienne d'une union effective à Dieu.

Il est préférable d’aller du vocabulaire latin au vocabulaire allemand pour comprendre Eckhart sans risque. Ainsi en va-t-il pour le mot déité, présent dans nombre de traductions françaises. Or, le texte latin d’Eckhart utilise toujours le couple « deus-divinitas », à une seule exception où ce couple devient « trinitas-deitas », et en allemand « Gott-Gottheit ». Une traduction se voulant savante a introduit le terme déité dans la traduction française, équivalent à deitas en latin, au lieu de conserver le texte eckhartien divinité, instillant l’idée qu’Eckhart reprendrait une partie de la théologie de Gilbert de La Porrée au premier quart du XIIe siècle. Selon l'adage « Tout ce qui est en Dieu est Dieu », alors, demande La Porrée, par quoi Dieu est-il Dieu, puisque ce par quoi on est quelque chose n'est pas celui qu'on est ? Ainsi, il introduit la distinction entre Dieu, divinité et déité. Eckhart ne le suit pas dans sa radicalité, même s'il connaît ses conceptions ontologiques, surtout à travers les reprises aménagées par Alain de Lille dans ses Règles de Théologie. Il emploie à dessein un autre vocabulaire pour se mettre à distance des excès porrétains, principalement dans sa théologie de la création[17].

L’expérience mystique est vue comme le retour à la Divinité manifestée dans le Christ vivant en le cœur du croyant. La vocation prédestinée de l’homme est d’être en Dieu. Si le Père engendre le Fils dans l’éternité, Dieu engendre le Fils dans le fond sans fond, l'abditus mentis d'Augustin, ou Grund en moyen-haut allemand, de l’âme. Toute cette théologie est très classique et porte le nom d'inhabitation trinitaire[18]. Ce n'est pas cette thèse qui a suscité la haine de deux confrères dominicains contre Eckhart, mais le refus de la réforme de l'ordre, à laquelle Eckhart prit part, et qui contrariait certains de ses confrères[19].

Reproches faits à la théologie eckhartienne

Ce qui finalement a monté des adversaires contre Eckhart est un ensemble complexe[20] :

  • des thèses utilisant le vocabulaire des béguines[21], affirmant qu'existe dans « le fond sans fond » de l'âme quelque chose qui échappe au temps, à l'espace et à tout mode d'existence, bref quelque chose d'éternel et de divin - une divine étincelle[22]. La peur du panthéisme qui a pu être évoquée par certains commentateurs modernes, n'alimentait pas les critiques exprimées dans les actes d'accusation, publiés dans le cinquième tome de l'édition critique de son œuvre latine. Certes, Cornelio Fabro, affirme que ce panthéisme se déduit du fait que « l’esse et l’essentia chez Eckhart ne sont pas du tout l’esse et l’essentia thomistes. Si Eckhart distingue comme tous les maîtres scolastiques l'être (esse) et l'étant, il ne réduit pas l'étant à l'existence, et n'oublie pas que l'Incarnation et l'immanence interdisent d'abstraire le divin de l'étant en actes. Ainsi déclare-t-il dans son Commentaire de la Sagesse[23] :

« S’il y avait en effet une justice et une autre, plusieurs justes seraient justes : ils seraient justes de manière équivoque, ou bien la justice se comporterait de manière univoque dans les justes. Mais en réalité, c’est de manière analogique, exemplaire, et primordiale qu’elle se tient, et elle ne tombe pas sous le nombre ni sous le temps. Et c’est quelque chose de général pour toutes les réalités spirituelles divines, suivant ce qui est dit dans le Psaume (147 (146-147), 5) : De sa Sagesse il n’est pas de mesure, ainsi que je l’ai remarqué ici-même. Car toute sagesse vient de Dieu, déclare l’Ecclésiaste, 1, (1). De là vient qu’Avicenne dit dans sa Métaphysique que la justice et la vertu sont par le Donateur des formes, mais il dit que les accidents corporels sont par l’action des qualités actives du corps qui sont variables »

De la sorte, il se positionne à la suite de Thomas d'Aquin contre les extrémistes des tenants de l’univocité comme de l’équivocité de l’être. Deux tendances existent bel et bien. Il y a ceux pour qui les mots conservent leur sens dans la réalité transcendante (divine) ou immanente (crée), ce sens unique qualifie l’univocité de l’être, qui est plus fréquent dans la postérité et l’œuvre de saint Bonaventure. En contrepoint, l’école thomiste défend la stricte rupture ontologique et donc une équivalence, une réalité équivoque, entre ces deux. Or Dieu seul est l’être. Dès lors Maître Eckhart est placé dans les penseurs de l’équivocité de l’être[24] ne reconnaît qu'un seul véritable acte [esse], Dieu, alors que pour saint Thomas chaque créature possède son propre acte formel (l’essentia) et son propre acte réel (l’esse - actus essendi) ». La première difficulté, toujours actuelle est celle du niveau de langage qui donne aux mêmes phrases des sens différents. Il semble qu'une partie des juges d'Eckhart à Avignon soient des partisans d'une théologie autre que le thomiste. Ceci a guidé le style littéraire de Maître Eckhart, et a nourri d'autres reproches, telles que ses formules paradoxales.

  • un goût de formules paradoxales où les données les plus subtiles de la dogmatique chrétienne sont exprimées de façon telle que même certains maîtres s'y perdent[25] ; après sa mort, à la fin du XIVe siècle, Zerbolt van Zutphen, un des fondateurs de la devotio moderna, en fera le contre-exemple d'une saine prédication[26]. Eckhart commet l'erreur de prêcher à des laïcs simples des « subtilités » qu'ils ne peuvent comprendre. Le Dévot moderne résume ainsi le fond de l'accusation portée contre Eckhart déjà en son procès, et à laquelle Eckhart avait répondu qu'il ne faisait en cela que suivre l'exemple du Christ qui donnait à tous des enseignements subtils. Cette charge du bibliothécaire de Deventer prend précisément place dans un court traité demandant si la Bible doit être traduite en langue populaire et proposée intégralement à tous. La réponse de Zerbolt van Zutphen sera celle reprochée longtemps à l'église catholique : afin d'éviter aux laïcs de se tromper, il ne faut pas leur donner plus que l'exemple de la piété et de la vertu, quitte à placer des vies simplifiées du Christ en lieu et place du texte biblique intégral. L'abandon actuel de cette attitude est un des éléments jouant en faveur d'un nouvel engouement pour Eckhart, perçu comme victime de la montée d'un obscurantisme[27].
  • une accentuation très nette du primat de la grâce de Dieu, qui ne pouvait qu'assimiler les chantres d'une ascèse volontariste à d'orgueilleux faux dévots[28].

La difficulté de ses thèses a conduit à de nombreuses interprétations erronées de son message. Eckhart avait pour projet d'écrire une œuvre originale. À l'époque des Sommes théologiques, il envisageait un ouvrage tripartite combinant les commentaires bibliques et la spéculation, organisé autour de mille questions. Cet opus tripartitum n'a pas été achevé, et les chercheurs tentent actuellement d'en retrouver des éléments dans les œuvres qui nous sont parvenues[29].

Le portail de maître Eckhart au prieuré d'Erfurt.

La théosis, ou divinisation, l'inhabitation trinitaire, le primat de la grâce, la structure paradoxale du dogme chrétien qui est une suite d'apories maintenues (Christ Dieu et homme, mort et vivant, Dieu un et trois ; l'homme saint et pécheur, le salut déjà là et pas encore là, etc.) – tout cela appartient à la tradition chrétienne, portée par les plus grands maîtres. C'est même l'une de ses caractéristiques ; le « problème Eckhart » ne serait donc plus qu'un problème de compréhension, une fois posé que Maître Eckhart refuse le principe de Jean Duns Scot de l'univocité de l'être[30] : ce principe pose comme préalable l'incapacité de transporter en Dieu par analogies des principes ontologiques formulés au sujet de ce qui n'est pas Dieu.

Selon Benoît Beyer de Ryke[31], la condamnation de Maître Eckart aurait pour origine avant tout le fait qu'il ait cherché à faire passer ses théories non pas dans ses traités théologiques en latin (dont la lecture était réservée à un petit nombre de lettrés) mais dans ses sermons publics adressés en langue vernaculaire, donc comprise de tous, à des dominicains mais aussi à des béguines et surtout à de simples laïcs. Marie-Anne Vannier résume ainsi la situation : « [C]e n'est pas sa théologie qui est en cause, mais le succès de sa parole auprès des foules. Eckhart se défend, montre qu'il est allé au cœur de la foi et reste uni à Dieu. On lui reproche de faire connaître à tous les plus hautes réalités de la vie spirituelle[32]. » Selon les spécialistes allemands du droit médiéval (W. Trusend), la mise en accusation d'Eckhart dans une bulle limitée géographiquement est le fruit de querelles internes à l'ordre dominicain, venues de la volonté de réforme du frère Eckhart.

Inspiration de Maître Eckhart

Maître Eckhart applique un principe fréquent au Moyen Âge, la discretio : il ne dit rien à son propre sujet. Une digression dans le commentaire de la Genèse, au sujet d'une plante utilisée en ophtalmologie, nous apprend un rare détail à son sujet : il avait des problèmes de vue, sans doute partiellement guéris. Cette discretio est-elle un phénomène de son temps ?

La réponse est nuancée : de façon générale, les mystiques n'ont rédigé le récit de leurs expériences que sur demande de leurs confesseurs ou de leur maître spirituel, plus rarement sur demande de l'être spirituel qui leur serait apparu (Dieu, la Vierge Marie). Les autobiographies médiévales existent donc, mais sont rares : Suso fait exception à la règle. La condamnation d'Eckhart semble avoir interdit toute biographie posthume, qui nous aurait renseignés sur son parcours intellectuel précis.

La pointe de son enseignement, là où il se distingue, n'est pas la prédication d'un détachement qui en ferait un genre de Bouddha chrétien. Ce détachement, ainsi que le montrent les derniers textes traduits, est un moyen de parvenir à l'accueil de Dieu en l'âme. Dieu y est accueilli avec toutes ses capacités. Dans un unique mouvement de grâce, l'homme est alors divinisé et enfante le Verbe, seconde Personne de la Trinité, dans le fond de son âme.

Cette théorie de la divinisation de l'homme, oubliée peu à peu à partir du XVe siècle, est redécouverte désormais en partie grâce à Eckhart. Telle est pour la plupart des Pères, ainsi que des maîtres médiévaux, la nature du salut chrétien : « devenir par grâce ce que Dieu est par nature » (Maxime le Confesseur) ; autrement dit : Dieu s'est fait homme pour qu'à son tour l'homme soit, par la grâce, divinisé, fait Dieu, sans perdre pour autant son identité. Pour Eckhart, cette deiformatio et l'enfantement de Dieu dans l'âme sont deux visages d'une même réalité : l'accueil, dans une âme détachée de tout, même de ses idées les meilleures sur Dieu, de la grâce qui sauve et glorifie dans l'union à Dieu. Beaucoup retiennent pourtant à son sujet l'influence d'Augustin, et du Pseudo-Denys l'Aréopagite, principalement dans toute la thématique dite « théologie négative », où ce qui est dit de Dieu est toujours au moins imparfait, au pire faux, bien qu'il soit nécessaire d'apporter une parole à l'être créé, alors que selon Eckhart, ce que désigne la parole n'est pas atteignable par les mots. Le seul argument faisant état du nombre de citations d'Augustin montre que celui-ci demeure sa première source.

On trouve dans Le Miroir des simples âmes anéanties, une thématique proche de celle que développera Maître Eckhart. Son auteur, Marguerite Porete, fut brûlée à Paris le [33], peu de temps avant le premier séjour qu'il y fit. Or, l'inquisiteur chargé d'instruire son procès résidait dans le même couvent qu'Eckhart. On trouve, disséminées dans l'œuvre d'Eckhart, de discrètes mais fermes allusions à l'ouvrage de Marguerite Porete, Le miroir des âmes simples anéanties, et à d'autres béguines.

Eckhart cite fréquemment de nombreux auteurs dont : Aristote, Sénèque, Augustin d'Hippone (de loin l'auteur qu'il cite le plus souvent), Denys l'Aréopagite, Boèce, Bernard de Clairvaux, Thomas d'Aquin, Albert Le Grand, Avicenne ou encore Averroès.

Les chercheurs français et allemands réunis au sein de l'Équipe de Recherches sur les Mystiques Rhénans (université de Lorraine) et de la Meister-Eckhart-Gesellschaft (Université d'Erfurt) ont engagé actuellement un programme de mise au jour et d'analyses des références présentes en ses écrits, principalement les références patristiques. Il a recours à des éléments de poésie, profane ou religieuse, et à des séquences liturgiques. En outre, il montre une excellente connaissance des sources habituelles de la scolastique (les Règles de théologie d'Alain de Lille), et même du droit (décret de Gratien). Si Platon est cité, Aristote l'est plus encore. Eckhart, selon la question, se déclare explicitement tributaire de l'une ou l'autre tradition philosophique.

Il est dans la continuité, et non dans la répétition, des penseurs dominicains du XIIIe siècle. Il prolonge le travail de pensée du dogme chrétien engagé par son ordre dès la naissance de la scolastique. Sur de nombreux points, il renvoie à Thomas d'Aquin. Comme ce dernier, il est très fidèle à la devise de son ordre : Contemplata aliis tradere (communiquer aux autres ce qui est contemplé). Mais il sait aussi préférer ou inventer des solutions originales là où les réponses thomasiennes ne le satisfont pas. À la différence de Thierry de Freiberg, un de ses prédécesseurs immédiats, à la fois dans le monde germanique et dans l'ordre dominicain, il se préserve des thèses d'Avicenne. De même, il n'utilise pas autant Proclus qu'Albert le Grand.

Postérité de Maître Eckhart

Maître Eckhart fut le fondateur du courant spirituel que l'on appelle la mystique rhénane. Deux grands prédicateurs dominicains furent ses disciples immédiats et d'autres ont été influencés par ses écrits :

  • Jean Tauler (vers 1300-1361) prêche à Strasbourg et à Bâle. Il reste très proche d'Eckhart, tout en donnant moins de place à la pensée de ce dernier, du moins apparemment et dans le domaine spéculatif, et plus à la parénèse[34].
  • Rulman Merswin (1307-1382), disciple de Jean Tauler, auteur du Livre des neuf rochers. Il s'agit probablement de la même personne que l'Ami de Dieu de l'Oberland dont les écrits dictaient la vie de la communauté qu'il avait fondé : les manuscrits conservés aux archives de Strasbourg conservent des pages dont les mots ont été remplacés par des mouvements erratiques de la plume, signe ou bien d'une « pieuse dissimulation » (Delattre-Devriendt) ou d'une pathologie (August Jundt). Le mouvement des Spirituels ou amis de Dieu a été examiné lors d'un colloque à Strasbourg, aux actes aujourd'hui publiés : c'est une peur diffuse, rendue présente par Jean de Lichtenberg, évêque de Strasbourg, mais confondant les Sprituali franciscains avec d'hypothétiques communautés de purs : le Concile de Vienne les a cherchés dans ses travaux préparatoires, en vain[35].
  • Henri Suso (1296-1366) à Cologne se distingue par une grande place accordée aux images et à l'imitation du Christ souffrant[36].
  • Jean de Dambach (1288-1372)[37] dominicain alsacien, qui a suivi Maître Eckhart à Cologne, lui a survécu et a connu Jean Tauler est un exemple parfait de l'influence réelle de Maître Eckhart que L'Encyclopédie des mystiques rhénans d’Eckhart au cardinal Nicolas de Cues et leur réception détaille au mieux[38].
  • Nicolas de Cues (1401-1464) fut un lecteur attentif d'Eckhart : c'est grâce à sa bibliothèque que nous conservons le seul manuscrit des sermons latins d'Eckhart, annoté de sa main.
  • Jan van Ruusbroec (1293-1381), le grand mystique flamand redécouvert par Maurice Maeterlinck au XIXe siècle, peut être replacé en perspective de la mystique rhéno-flamande dont Maître Eckhart est le plus illustre représentant, cependant Ruusbroec était autant en désaccord avec de nombreux points de la pensée de Maître Eckhart, que réceptif aux « Institutions Divines », ouvrage composite où les pensées Henri Suso et Jean Tauler sont associées[39]. Les disciples de Ruubroec à Deventer, les Frères de la Vie commune seront ainsi à la fois proche d'une piété venue de Tauler et Suso, et ouvertement hostiles à Maître Eckhart, comme en témoigne le libelle de Zerbolt van Zutphen, De libris Teutonicis, où il paraphrase la bulle In Agro Dominico (ayant condamné comme mal sonnantes vingt-six propositions eckhatiennes) de façon très polémique[40].
  • Jakob Böhme (1575-1624), dans sa vision mystique globale, s'en inspire[41].
  • Maître Eckhart a été cité à de nombreuses reprises par certains Réformateurs[42]. L'orthodoxie luthero-calvinienne aura cependant tendance à rejeter l'inspiration eckhartienne, l'accusant d'inspirer les enthousiastes anabaptistes.
  • Les Entretiens spirituels ou Discours du discernement ont fait l'objet d'une large diffusion en France à partir de la fin du XVIe siècle, parce qu'ils ont été intégrés dans une anthologie de textes de la mystique rhénane placée sous le nom de Tauler, les Institutions spirituelles. Ce livre a été publié en latin par les chartreux de Cologne et a connu trois traductions françaises entre 1587 et 1658, qui ont fait l'objet de nombreuses rééditions. Certains mystiques français en ont été profondément marqués, sans savoir que ce qu'ils lisaient était des textes de Maître Eckhart[43].
  • Parmi les philosophes le citant, en soulignant ses qualités et son importance, on peut nommer Hegel, qui dit le lire avec intérêt[44]. Henri Delacroix en 1900 a cru renouveler radicalement le néoplatonisme en affirmant «  un pressentiment de la méthode dialectique que Hegel devait porter à son achèvement ; maître Eckart a senti que la déduction ne peut rien tirer de l’Être absolu, c’est-à-dire de l’Être indéterminé et qu’il faut recourir à d’autres moyens pour déterminer son mouvement[45]. » Cette étude n'est plus citée, car fautive, dans les publications actuelles.

Au XXe siècle, le pangermanisme nazi crut pouvoir accaparer Eckhart. Alfred Rosenberg lui consacra un ouvrage en 1928[46] et un long développement dans Le Mythe du vingtième siècle[47]. Interdiction fut faite à Raymond Klibansky[48] (1905-2005), parce qu'il était juif, d'étudier ses ouvrages. Cette tentative de récupérer Eckhart échoua ; comme le note Wolfang Wackernagel, spécialiste suisse de ce dernier, il n'y a pas de traces d'antisémitisme chez un auteur qui dit toute son admiration pour Moïse Maïmonide[49],[50].

Eckhart est encore invoqué par les partisans du néo-paganisme, tels Sigrid Hunke[51] et Alain de Benoist. Ce dernier voit en lui un des grands « hérétiques » qui ont contribué à transmettre le paganisme en opposition avec l’idéologie officielle, et chez qui « il faut rechercher certains des principes fondamentaux d’un néo-paganisme faustien »[52],[53].

Eckhart a inspiré le psychologue suisse Carl Gustav Jung[54].

C'est avec Heidegger que les références sont les plus explicites[55]. Dès son étude de Jean Duns Scot, Heidegger annonce la nécessité d'approfondir la pensée du maître thuringien. D'après Philippe Capelle-Dumont, Heidegger a cherché dans Eckhart une phénoménologie de la religion, la pensée de l'être (ontologie), et l'attente de Dieu. L'ontologie heideggerienne, et sa pensée de l'Un, s'enracinent dans plusieurs systèmes médiévaux, dont celui d'Eckhart.

Plus proche de nous, la parenté avec la philosophie de Michel Henry est assez forte pour qu'une thèse et de nombreuses publications lui aient été consacrées, principalement dans le registre de l'ineffable et de l'engendrement[56].

Par ailleurs, les textes de Maître Eckhart ont inspiré au compositeur de musique contemporaine Pascal Dusapin la pièce pour chœur mixte Granum sinapis (1997).

Les derniers moments de la vie de Maître Eckhart ont inspiré à Jean Bédard un roman intitulé Maître Eckhart (1998)[57].

Œuvres

L'œuvre latine encore inédite est en cours de traduction sous la direction de Marie-Anne Vannier. Pour l'œuvre allemande, les traductions de Jeanne Ancelet-Hustache au Seuil, de Gwendoline Jarczyk et Pierre-Jean Labarrière, et de G. Pflister aux éditions Arfuyen présentent le texte français des tout derniers sermons authentiques découverts.

Œuvre allemande

  • Sermons allemands (fr) (spé. Albin Michel et Arfuyen)
  • Traité du Détachement (fr)
  • Traité de l'Homme noble (fr)
  • Livre de la Consolation divine (fr)
  • Les Entretiens Spirituels ou Discours du discernement (fr)
  • Le Grain de sénevé ou Granum sinapis

Œuvre latine

  • Sermons latins ou Œuvre des Sermons (fr) (Éd. du Cerf)
  • Questions parisiennes I à III (fr)
  • Réponse aux accusations
  • Commentaire de la Genèse (fr)
  • Commentaire de l'Exode (fr)
  • Commentaire du livre de la Sagesse (fr) (Éditions Belles Lettres)
  • Commentaire des Paraboles de la Genèse (fr) (Éditions Belles Lettres)
  • Commentaire du Cantique des Cantiques (fragments)
  • Commentaire du Siracide (fragments)
  • Commentaire de l'Évangile de Jean (fr. Prologue, Éd du Cerf / livre entier en cours de traduction)
  • Questions latines nouvellement authentifiées, Trad. et commentaire allemand, anglais, et français, coordonnés en un travail commun, sous la direction de Markus Vinzent et Marie-Anne Vanier, sous presse.

Notes et références

Notes

  1. Voir Bernard McGinn, The mystical thought of Meister Eckhart, New York, Crossroad, 2001 : on sait depuis plus de 20 ans, grâce aux découvertes de Walter Senner, que les dominicains allemands du XVIIe siècle faisaient mémoire de Maître Eckhart le 28 janvier, et cette célébration conventuelle ou provinciale a lieu le jour du décès.
  2. Le terme « Teutonie » ou Teutonicum regnum était l’expression commune au Moyen Âge pour désigner une région issue de la Francie orientale au sein du Saint-Empire romain germanique. Ce terme sera traduit en français par Royaume de Germanie.

Références

  1. 1 2 3 4 5 6 7 Marie-Anne Vannier, Cheminer avec Maître Eckhart : Au cœur de l'anthropologie chrétienne, Perpignan, Artège Éditions, , 204 p. (ISBN 978-2-36040-752-1, lire en ligne).
  2. E. Triebel, « Édition électronique des sources et documents relatifs au procès d’Eckhart », source internet disponible via http://www.eckhart.de, 2010. Acta Echartiana, Lois Strurlese ed., Meister Eckhart, Die lateinischen Werke, V, Kohlhammer, Stuttgart, 2006, p. 521-651.
  3. « Bulle de Jean XXII : In agro dominico, du 27 mars 1329 » [PDF], sur www.pileface.com (consulté le ).
  4. Encyclopédie des mystiques rhénans d'Eckhart à Nicolas de Cues et leur réception, Cerf, 2011, article « Procès ».
  5. « Texte du communiqué ».
  6. Jean Leclercq, « La théologie comme science d'après la littérature quodlibétique », Recherches de théologie ancienne et médiévale,, vol. 11 (octobre 1939),, pp. 351-374 (lire en ligne Accès payant)
  7. Jean Devriendt, Encyclopédie sur les Mystiques Rhénans,, Paris, le Cerf, art. « Sermons latins"
  8. Ysabel de Andia,, « « La théologie négative de Maître Eckhart », », in Maître Eckhart et Jan van Ruusbroec, B. Beyer de Ryke (dir.),, Éd. université de bruxelles, 2004, p. 52-70.
  9. Jean Vanneste, Le mystère de Dieu,, Bruges,, Desclée de Brouwe, , p. 70
  10. (la) Maître Eckhart, Die Lateinischen Werke, Opus Sermonum, Sturrgart, Kohlhammer, , "Deus autem ab omni numero proprie eximitur. Est enim unus sine unitate, trinus sine trinitate, sicut bonus sine qualitate etc. Est enim 'super omne nomen', rationem et intellectum et super esse et ens, cuius differentia est numerus, et omnia huiusmodi. Quod autem sit supra ens et esse, patet, quia est causa entis et esse. » p. 113, § 118
  11. Marie-Anne Vannier, Commentaire du Livre de la Sagesse, Paris, Les Belles Lettres, (ISBN 9782251183176), Introduction, p. 22
  12. J. Devriendt, « La naissance de Dieu dans l'âme dans les Sermons latins d'Eckhart », in : La naissance de Dieu dans l'âme chez Eckhart et Nicolas de Cues, Paris, Cerf, coll. « Patrimoines », 2006, p. 39-54.
  13. cf. les différents articles consacrés au détachement, tels que Markus Enders (dir.), Gelassenheit und Abgeschiedenheit: Studien zur deutschen Mystik, (Boethiana 82), Hamburg, Kovac, 2008 (recension Lydia Wegener, in: Church History and Religious Culture 88 (2008), S. 469–472) ; Markus Enders, « Meister Eckhart », in Gelassenheit und Abgeschiedenheit, Hamburg, Kovac, 2008, p. 21-48 (première éd. S. Cuppers (dir.), Kölner Theologen. Von Rupert von Deutz bis Wilhelm Nyssen, Köln 2004, p. 106–135) ; Markus Enders, « Die «Reden der Unterweisung» : Eine Lehre vom richtigen Leben durch einen guten und vollkommenen Willen », in Gelassenheit und Abgeschiedenheit, Hamburg, Kovac, 2008, p. 49-75 (première éd. K. Jacobi (dir.), Meister Eckhart: Lebenssituationen – Redesituationen, Berlin 1997, p. 69–92) ; voir aussi dans l’Œuvre des Sermons les sermons I, LII.
  14. Le travail de référence est ici la thèse doctorale de Wolfgang Wackernagel, « Imagine denudari. Éthique de l'image et métaphysique de l'abstraction chez Maître Eckhart », in Études de philosophie médiévale no 68, Paris, Vrin (Sorbonne) 1991 (224 pages).
  15. Jean Devriendt, Introduction à l’« Œuvre des Sermons », Cerf, Sagesses Chrétiennes, Paris, 2010, Introduction, p. 22.
  16. La synthèse des connaissances actuelles sur cette question est donnée dans Benoît Beyer de Ryke, Maître Eckhart, une mystique du détachement, Bruxelles, Ousia, 2000.
  17. Marie-Anne Vannier, « S. Augustin et Eckhart. Sur le problème de la création », Mélanges. J. Oroz Reta, Augustinus, 39, 1994, p. 551-561.
  18. Marie-Anne Vannier, « L'Être, l'Un et la Trinité chez Eckhart », in Mystique : la passion de l'Un de l'Antiquité à nos jours, Bruxelles, Publications de l'Université de Bruxelles, 2005, p. 133-139.
  19. Voir Kurt Ruh, Initiation À Maître Eckhart - Théologien, Prédicateur, Mystique, Cerf, 1997.
  20. W. Trusen, Der Prozess gegen Meister Eckhart : Vorgeschichte, Verlauf und Folgen, Schöningh, Paderborn, 1988 ; J. Devriendt, « Procès », in : M.-A. Vannier, W. Euler, K. Reinhardt, H. Schwaetzer, Encyclopédie des mystiques rhénans d’Eckhart à Nicolas de Cues et leur réception, Cerf, Paris, 2011, p. 983-1003. }
  21. Georgette Epiney-Burgard, Émilie Zum Brunn, Femmes troubadours de Dieu, Brepols, 1988, Paris.
  22. Maurice De Gandillac, Genèse de la modernité. Chap. XII. L’abîme et l'étincelle (aspects de l'eckhartisme), Cerf, 1992, Paris.
  23. Maître Eckhart, Commentaire du livre de la Sagesse, Traduction par Jean-Claude Lagarrigue et Jean Devriendt Introduction et commentaires, par Marie-Anne Vannier, Publié avec le concours de la MSH Lorraine, USR 3261 et du Centre Écritures Université de Metz-Lorraine, Les Belles Lettres, Sagesses Médiévales, Paris, 2015, § 44, p. 94 . Citation reproduite avec l'aimable autorisation des auteurs.
  24. cf. A. de Libera, Le Problème de l’être chez Maître Eckhart. Logique et métaphysique de l’analogie, Cahiers de la Revue de théologie et de philosophie, 4, Genève-Lausanne-Neuchâtel, 1980. 100.
  25. Gerard Huber, « Negative Theologie und Paradoxes Ethos bei Meister Eckhart », in Recueil d'études offert à Fernand Brunner. Métaphysique, Histoire de la philosophie, à La Baconnière, « Langages », Neuchâtel, 1981, p. 135 et ss. ; Cyprian Smith, The Way of Paradox: Spiritual Life As Taught by Meister Eckhart, Longmann and Todd, 1987, Londres.
  26. (en + la) A. Hyma, « The De Libris Teutonicalibus By Gerard Zerbolt of Zutphen »,, Nederlands Archief voor Kerkgeschiedenis / Dutch Review of Church History Volume: 17 Issue 1, pages 42-70
  27. M.-A. Vannier (Dir.), Mystique rhénane et Devotio Moderna, Paris, Beauchesne, 2017. M.-AVannier dir. Les chemins spirituels dans la mystique rhénane et la devotio moderna, Paris, éditions Beauchesne, 2019
  28. Édition des documents Loris Sturlese, « Die dokumente zum Prozeß gegen Meister Eckhart », in Heinrich Stirnimann, Ruedi Imbach, Eckhardus Theutonicus homo doctus et sanctus. (Nachweise und Berichte zum Prozess gegen Meister Eckhart), Dokimion no 11, Nouveaux suppléments à Freiburger Zeitschrift für Philosophie und Theologie, Universität Verlag, Fribourg, 1992, p. 1-6 ; Gabriel Théry, « Édition critique des Pièces relatives au procès d'Eckhart contenues dans le manuscrit 33 b de la bibliothèque de Soest », Archives d’Histoire Doctrinale et Littéraire du Moyen Âge, 1, 1926-1927, p. 129-268.
  29. Ces intentions sont données par Eckhart dans son Prologue à l'œuvre tripartite, contenu au début de son commentaire de la Genèse, édité et traduit en français - Commentaire de la Genèse précédée des Prologues, Fernand Brunner, Alain De Libera, Édouard Henri Weber, Émilie Zum Brunn, intro, trad., Cerf, L’œuvre latine de Maître Eckhart, 1, 1989, Paris. La mise au point la plus accessible est donnée par Kurt Ruh, Initiation À Maître Eckhart - Théologien, Prédicateur, Mystique, Cerf, 1997.
  30. Vladimir Lossky, Théologie négative et connaissance de Dieu chez Maître Eckhart, Vrin, Paris, p. 311.
  31. Maître Eckhart, éditions Entrelacs, p. 67.
  32. Introduction du Livre des paraboles de la Genèse, Belles Lettres, 2016, p. 34.
  33. Voir Kurt Ruh, Initiation à Maître Eckhart: théologien, prédicateur, mystique, page 139.
  34. Louise Gnaedinger, Johannes Tauler, Lebenswelt und mystische Lehre, H. Beck, Munich, 1993 (en allemand) ; Jean Tauler, Sermons, E. Hugueny, G. Théry, M.A.L. Corin trad., Cerf, Sagesses chrétiennes, Paris, 1991.
  35. Jean Devriendt, Le Libre Esprit, l'évêque de Strasbourg et Maître Eckhart, in: D. Mieth, M. Vinzent, M.-A. Vannier, C. Wojtulewicz (Ed.), Meister Eckhart in Paris and Strasbourg, Leuven, Peeters, 2017
  36. Voir le site de la Bibliothèque nationale Universitaire de Strasbourg, manuscrits numérisés, le manuscrit fortement illustré de l' Exemplar d'Henri Suso ; Meister Eckhart und seine Jünger. Ungedruckte Texte zur Geschichte der Deutschen Mystik, Jostes Franz éd., Ruh Kurt postface, W. de Gruyter, 1972, New York Berlin ; Henri Suso, Œuvres complètes, Ancelet-Hustache Jeanne trad., intro. et notes, Seuil, 1977, Paris.
  37. « Jean de Dambach (1288-1372) - Auteur », sur data.bnf.fr (consulté le ).
  38. Marie-Anne Vannier et al., L'Encyclopédie des mystiques rhénans d’Eckhart à Nicolas de Cues et leur réception, Paris, Cerf, , 1279 p.
  39. Alain de Libera, Eckhart, Suso, Tauler ou la divinisation de l'homme, Paris, éditions Bayard, 1996, p. 199.
  40. Marie-Anne Vannier (dir.), Les chemins spirituels dans la mystique rhénane et la devotio moderna, Paris, Beauchesne, , 285 p. (ISBN 9782701022789), (actes du colloque)
  41. Benz Ernst, Les sources de la philosophie romantique allemande, Jean Vrin, Paris, 1968 ; Alain Dierkens, Benoît Beyer de Ryke, Benoît Maître Eckhart et Jan van Ruusbroec. Études sur la mystique ’rhéno-flamande’ (XIIIe et XIVe siècles), Bruxelles, éditions de l'Université de Bruxelles, 2004.
  42. Remarquons toutefois que Luther avait plus de prédilection pour Jean Tauler, « le plus correct des mystiques », que pour Eckhart. Il édite également l'œuvre anonyme connue sous le nom de "Theologia deutsch. Das ist ain edels und kostlichs büchlin von rechten verstand, was Adam und Christus sey, und wie Adam in uns sterben, und Christus ersteen soll, Jean Knobloch", 1519, Strasbourg, édition préfacée par Luther. Voir aussi Kraatz Martin, Luther und Shinran - Eckhart und Zen, Brill, Beihefte der Zeitschrift für Religions - und Geistesgeschichte, 31, 1931, Cologne.
  43. Jean-Marie Gueullette, Eckhart en France. La lecture des Institutions spirituelles attribuées à Tauler, 1548-1699., Grenoble, J. Millon, , 363 p. (ISBN 978-2-84137-273-7).
  44. Franz von Baader (1765-1841) fera découvrir Eckhart à Hegel : « J'étais à Berlin très souvent en compagnie de Hegel. Un jour, en 1824, je lui lus des textes de Maître Eckhart, dont il ne connaissait jusque-là que le nom. Il fut si enthousiasmé qu'il donna l'autre jour toute une conférence sur Maître Eckhart devant moi, et qu'il finit par ces paroles : Voilà exactement ce que nous voulons. » Franz von Baader, Sämtliche Werke, Bd., 15, p. 159.
  45. Delacroix 2022, p. 220.
  46. Dietrich Eckhart : Ein Vermächtnis, München, 1928.
  47. « Chez Maître Eckhart, l’âme nordique arrive pour la première fois à la pleine conscience d’elle-même ». « La philosophie judéo-romaine est remplacée par la confession de l’âme nordique occidentale, c’est-à-dire de la dimension intérieure de l’homme allemand, de la race nordique », Alfred Rosenberg, Le Mythe du vingtième siècle.
  48. Raymond Klibansky, The Continuity of the Platonic Tradition During the Middle Ages. Outline of a Corpus Platonicum Medii Ævi, Londres 1939, 58 p.
  49. Friedlander Albert H., « Eckhart et la tradition juive : Maïmonide et Paul Celan », in Zum Brunn Émilie dir., Voici Maître Ekhart, éd. Jérôme Millon, Grenoble, 1994, p. 385-400, Moïse.
  50. (he)Yossef Schwartz, « Pour toi le silence… ». Maître Eckhart lit le Guide des Egarés, Tel Aviv, Am Oved, 2002
  51. « Dans ces convergences, elle [Sigrid Hunke] a su lire une continuité spirituelle exprimant les lignes de force d’une « religion de l’Europe » - la vraie religion de l’Europe -, une religion qui apparaît dès la fin du IVe siècle avec Pelage, qui réapparaît au IXe siècle avec Scot Erigène, qui se poursuit au XVIe siècle avec Maître Eckhart et ses disciples… » Alain de Benoist, Comment peut-on être païen ?, Paris 1981, p. 241-242.
  52. Comment peut-on être païen ?, Paris 1981, p. 241.
  53. Émilie Zum, Alain de Libera, Maître Eckhart: métaphysique du verbe et théologie négative, p. 53.
  54. Michel Cazenave, Jung revisité, tome 2, Jung et le religieux, chapitre « Jung et maître Eckhart ».
  55. Isidoro Flaumbaum, Meister Eckhart y Martin Heidegger. Buenos Aires 1944. - Auch: Minerva 1.
  56. Voir tous les travaux de Jean Reaidy, ex. J. Reaidy, « Une relecture contemporaine de la naissance de Dieu dans l'âme par Michel Henry », in : La naissance de Dieu dans l'âme chez Eckhart et Nicolas de Cues, p. 159-181, et sa thèse de doctorat, Phénoménologie de la naissance chez Michel Henry, sous la dir. de Francis Guibal, où il a abordé ce sujet.
  57. Jean Bédard, Maître Eckhart, Stock, , 349 p. (ISBN 2-234-05230-0)

Voir aussi

Bibliographie

Traductions françaises

  • Traités et sermons, traduction par F.A. et J.M., introduction de Maurice de Gandillac, Aubier, éditions Montaigne, 1942.
  • Œuvres de Maître Eckhart : Sermons - traités (trad. Paul Petit), Gallimard, . Réédition 1987 avec une préface de Jean-Pierre Lombard.
  • Les Traités, introduction et traduction de Jeanne Ancelet-Hustache, Seuil, 1971.
  • Sermons, introduction et traduction de Jeanne Ancelet-Hustache, Seuil, 3 volumes, 1974, 1978 et 1979.
  • Commentaire du livre de l'Exode, trad. Pierre Gire, Lyon, Associations des facultés catholiques de Lyon, 1980.
  • Le Commentaire de la Genèse, précédé des Prologues, Texte latin, trad. Fernand Brunner, Alain de Libera, Édouard Wéber, Émilie Zum Brunn, Cerf, 1984.
  • Le Commentaire de l'Évangile selon Jean : Le Prologue, Texte latin, trad. Alain de Libera, Édouard Wéber et Émilie Zum Brunn, Paris, Cerf, 1989.
  • Traités et sermons, traduction d'Alain de Libera, Flammarion, coll. « GF », 1993.
  • Commentaire du Notre Père, trad. E. Mangin, Éditions Arfuyen, 1995.
  • Les Traités et le Poème, trad. Gwendoline Jarczyk et Pierre-Jean Labarrière, Albin Michel, 1996.
  • Sermons et leçons sur l'Ecclésiastique, trad. F. Brunner, Genève, Ad Solem, 2002.
  • Sur la naissance de Dieu dans l'âme (Sermons 101 à 104), trad. G. Pfister, Présentation Marie-Anne Vannier, Éditions Arfuyen, 2004.
  • Les Sermons, Gwendoline Jarczyk et Pierre-Jean Labarrière, Albin Michel, 2009.
  • L'Œuvre des sermons (Erfurt - Paris - Strasbourg - Cologne), J. Devriendt, Cerf, 2011.
  • Commentaire du Livre de la Sagesse, Paris, Belles Lettres, 2015, trad. J.-C. Lagarrigue et J. Devriendt, introd. M.-A. Vannier.
  • Les paraboles de la Genèse, Paris, Belles Lettres, 2016, traduction Jean-Claude Lagarrigue, introd. Marie-Anne Vannier, Maxime Mauriège,
  • Ainsi parlait Maître Eckhart (bilingue moyen haut-allemand-français), dits et maximes de vie de Maître Eckhart choisis et traduits du moyen haut-allemand par Gérard Pfister, Éditions Arfuyen, 2016.
  • Intégrale des 180 sermons, traduction de Laurent Jouvet, Almora, 2022 [présentation en ligne].

Études

  • Jeanne Ancelet-Hustache, Maître Eckhart et la mystique rhénane, Paris, Seuil, 1956.
  • E. Zum Brunn, Voici maître Eckhart, Grenoble, J. Millon, 1994.
  • Fernand Brunner, Maître Eckhart, Seghers, Paris, 1969.
  • Fernand Brunner, Études sur Maître Eckhart, Paris, Hermann, 2012 (ISBN 978-2-7056-8156-2).
  • Benoît Beyer de Ryke, Maître Eckhart, une mystique du détachement, Bruxelles, Ousia, 2000 (« Figures illustres », 1) [diffusion : Vrin].
  • Benoît Beyer de Ryke, Maître Eckhart, Paris, Entrelacs, 2004, coll. « Sagesses éternelles » (Prix Henri Davignon de l'Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique, 2005).
  • Julie Casteigt, Connaissance et vérité chez Maître Eckhart. Seul le juste connaît la justice, Paris, Vrin, 2006, coll. « Études de philosophie médiévale », 480 p., (ISBN 9782711618927).
  • Julie Casteigt (dir.), Maître Eckhart, textes de Jan A. Aertsen, Gwenaëlle Aubry, Julie Casteigt, Emmanuel Cattin, Jean-Michel Counet, Eléonore Dispersyn, Kurt Flasch, Stephen E. Gersch, Rodrigo Guerizoli, Laurent Lavaud, Alain de Libera, Sébastien Milazzo, Burkhard Mojsisch, Yossef Scawartz, Loris Sturlese, Shizuteru Ueda, Marie-Anne Vannier, Paris, Éditions du Cerf, coll. « Cahiers d’Histoire de la Philosophie », 2012.
  • Henri Delacroix, Essai sur le mysticisme spéculatif en Allemagne au XIVe siècle, Paris (1900), Puyméras (2022), Éditions Alcan (1900), Éditions localement transcendantes (2022), (1re éd. 1900).
  • Alain Dierkens et Benoît Beyer de Ryke, éd., Maître Eckhart et Jan van Ruusbroec. Études sur la mystique ’rhéno-flamande’ (XIIIe et XIVe siècles), Bruxelles, Editions de l'Université de Bruxelles, 2004, coll. « Problèmes d'histoire des religions », 14.
  • Suzanne Eck, Initiation à Maître Eckart, « Jetez-vous en Dieu », Paris, Le Cerf, 2000.
  • Kurt Flasch, D'Averroès à Maître Eckhart, Paris, Vrin, Conférence Pierre Abélard, 2008.
  • Kurt Flasch, Maître Eckhart. Philosophie du christianisme, Paris, Vrin, 2011.
  • Jean-Marie Gueullette, Eckhart en France. La lecture des Institutions spirituelles attribuées à Tauler. 1548-1699, Grenoble, J. Millon, 2012 (ISBN 978-2-84137-273-7).
  • Gwendoline Jarczyk et Pierre-Jean Labarrière, Maître Eckhart ou l'Empreinte du désert, Paris, Albin Michel, 1995.
  • Alain de Libera, La Mystique rhénane. D'Albert le Grand à Maître Eckhart, Paris, Le Seuil, coll. « Points », 1994. (ISBN 2-02-021112-2).
  • Vladimir Lossky, Théologie négative et connaissance de Dieu chez Maître Eckhart, Paris, Vrin, coll. « Études de philosophie médiévale », 2002.
  • Éric Mangin, Maître Eckhart ou la profondeur de l’intime, Seuil, 2012.
  • Hervé Pasqua, Maître Eckhart. Le procès de l'Un, Paris, Le Cerf, 2006, coll. La nuit surveillée.
  • Kurt Ruh, Initiation à Maître Eckhart, Théologien, prédicateur, mystique, traduit de l'allemand par Janine De Bourgknecht et Alain Nadeau, présentation de Ruedi Imbach et Alain Nadeau, Paris, Le Cerf, 1997.
  • Reiner Schürmann, Maître Eckhart ou la Joie Errante, coll. « L'expérience intérieure », Paris, Denoël, 1972.
  • Reza Shah-Kazemi, Shankara, Ibn Arabi et Maître Eckhart: La Voie de la Transcendance, Paris, L'Harmattan, 2010.
  • Rémy Valléjo, Maître Eckhart. Je ne sais pas, Cerf, 2018
  • Rémy Valléjo, Réduit à rien. Les derniers jours de Maître Eckhart, Cerf, 2021
  • Marie-Anne Vannier, « Création et négativité chez Eckhart », in Revue des sciences religieuses, 67/4 (1993), p. 51-67.
  • Marie-Anne Vannier, « La connaissance de soi chez Augustin et Eckhart », in La France latine, 132 (2001), p. 15-37.
  • Marie-Anne Vannier dir., La naissance de Dieu dans l’âme chez Eckhart et Nicolas de Cues, Paris, Le Cerf, Patrimoines, 2006.
  • Marie-Anne Vannier dir., La Prédication et l'Église chez Maître Eckhart et Nicolas de Cues, Paris, Le Cerf, 2008.
  • Marie-Anne Vannier dir., La Trinité chez Eckhart et Nicolas de Cues, ouvrage publié avec le concours de l'Université Paul-Verlaine de Metz, Paris, Le Cerf, 2009.
  • Marie-Anne Vannier, Eckhart Prédicateur.
  • H.-Édouard Wéber, « La théologie de la grâce chez Maître Eckhart », Revue des sciences religieuses, 70/1, 1996, p. 48-72.
  • Encyclopédie des mystiques rhénans d'Eckhart à Nicolas de Cues et leur réception. L'apogée de la théologie mystique de l'Église d'Occident , Paris, Le Cerf, 2011. consultable en ligne
  • (it) Laura Mancinelli, De Charlemagne à Luther : La littérature allemande médiévale, Turin, Bollati Boringhieri, 1996 (ISBN 978-8-83390-963-9).
  • Bibliographie mise à jour en permanence des publications reconnues de qualités par la Meister Eckhart Gemeinschaft, présentation au choix par date ou auteur ou en recherche de texte libre, disponible en ligne

Articles connexes

  • Émanatisme
  • Mystique rhénane

Liens externes

Bibliographie eckhartienne