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Gerda Taro
Gerda Taro en juillet 1937.
Biographie
Naissance
Décès
(à 26 ans)
L'Escurial
Sépulture
Nom de naissance
Gerta Pohorylle
Pseudonyme
Gerda Taro
Nationalité
Activités
Photographe de guerre, photojournaliste, photographe
Période d'activité
à partir de
Père
Heinrich Pohorylle (d)
Mère
Gisela Boral (d)
Autres informations
A travaillé pour
Alliance-Photo ()
Mouvement
Genre artistique
Représentation figurée (d)
Vue de la sépulture.

Gerta Pohorylle, dite Gerda Taro, née le à Stuttgart, Allemagne, et morte le à l'Escurial en Espagne, est une photojournaliste allemande connue notamment pour ses reportages sur la guerre d'Espagne.

Compagne du photographe de guerre Robert Capa dont elle a inventé le pseudonyme et contribué à lancer la carrière.

Elle est la première femme photographe de guerre à avoir trouvé la mort lors d'un reportage, pendant la guerre civile espagnole, en 1937, à vingt-six ans.

La découverte tardive de nombreux négatifs donne une dimension nouvelle à son travail, longtemps sous-estimé.

Elle est inhumée au cimetière du Père-Lachaise à Paris, ville où elle avait trouvé refuge en 1933 pour échapper au nazisme.

Biographie

Née au sein d'une famille modeste de commerçants juifs immigrés de Galicie, Gerta Pohorylle bénéficie d'une éducation bourgeoise et artistique. Sa famille, endettée, déménage à Leipzig vers 1930.

Elle y fait la connaissance d'un étudiant en médecine, Georg Kuritzke, qui lui confirme ses intuitions révolutionnaires. En 1933, après s’être jointe à des groupes de gauche anti-nazis[1], elle est arrêtée pour distribution de tracts et fait l’expérience de la prison. À la fin de la même année, face à la montée de la répression contre les opposants politiques, elle est contrainte de quitter l’Allemagne[2].

Elle s'installe à Paris fin 1933 avec son amie Ruth Cerf. En ces temps où la France souffre de la Grande Dépression économique mondiale, Gerda ne trouve que des travaux occasionnels de secrétaire, et passe une partie importante de sa vie dans les cafés du quartier du Montparnasse, notamment Le Dôme, où bon nombre d'artistes et d'intellectuels se retrouvent.

Elle y anime le groupe Leipziger Kreis avec Trudel Frank-Fromm, Ruth Cerf et Willi Chardack, groupe qui se réunit au café Capoulade sur le boulevard Saint-Michel, et auquel participent les membres du S.A.P (Parti socialiste ouvrier d'Allemagne) en exil[2].

Elle travaille ensuite comme assistante à l'agence Alliance-Photo créée par Maria Eisner, Pierre Verger et Pierre Boucher en 1934[3].

L’« invention » de Robert Capa

Robert Capa photographié par Gerda Taro en mai 1937.
Soldate républicaine à Barcelone, Gerda Taro, photographie sur la plage du Somorrestro, à Barcelone, août 1936.

Gerda Taro fait la connaissance du photographe d'origine hongroise Endre Ernő Friedmann, avec qui elle travaille et entretient une liaison amoureuse à partir de 1935. Elle le fait entrer à Alliance-Photo[3].

Leur carrière ne décolle pas vraiment jusqu'au stratagème qui lance la carrière de Friedmann. En effet, elle invente pour lui le personnage du « photographe américain » et lui donne le pseudonyme de Robert Capa. Elle choisit pour elle-même celui de Gerda Taro. Gerda fait avec talent la promotion des clichés de son compagnon auprès des journaux.

1936, première carte de presse

Sa première carte de presse date du , délivrée par A.B.C.-Press-Service, une agence de photo d'Amsterdam.

Dès le début de la guerre d'Espagne, Taro et Capa suivent les combats des Brigades internationales aux côtés des combattants républicains, comme photographes de guerre.

Alors qu'ils signent leurs photos de leurs deux noms, Capa y gagne une reconnaissance mondiale tandis que le travail de Taro reste dans l’ombre. Elle décide de le quitter pour couvrir le bombardement de Valence et vendre son travail sous son seul nom[4].

1937, la mort en reportage

L'annonce de la mort de Gerda Taro dans la presse française.

Lors des violents combats autour de Madrid, elle est écrasée par un char républicain près de Brunete, et meurt, le lendemain [5], à l'hôpital de l'Escurial où des amis, le poète Rafael Alberti et son épouse María Teresa León, vont reconnaître le corps. Dans la voiture où Gerda Taro s'est juchée sur le marchepied, se trouve également Ted Allan, envoyé spécial de la Federated Press et du journal Clarion de Toronto, qui lui a eu un pied cassé[6],[7].

« Notre reporter photographe Gerda Taro a été tuée près de Brunete où elle avait assisté à la bataille. Un tank républicain tamponna la voiture sur le marchepied de laquelle elle était montée pour quitter le village tombé aux mains des insurgés. »

— Notice nécrologique dans la revue Ce soir[8]

Elle est la première femme[9] photographe de presse tuée dans l'exercice de ses fonctions[10].

Son enterrement au cimetière du Père-Lachaise, le , en présence de milliers de personnes, devient une manifestation antifasciste. Son éloge funèbre est prononcé par Pablo Neruda et Louis Aragon[11]. Sa tombe située près du mur des Fédérés, division 97 du cimetière, est dessinée par le sculpteur Alberto Giacometti à la demande d'Aragon : il l'orne d'une simple vasque et d'un oiseau mythologique, le faucon Horus, symbole de lumière et de résurrection[12]. La date de naissance mentionnée sur la tombe est 1911 au lieu de 1910. Sa tombe est profanée par les nazis en 1942[2].

En septembre 1937, lors de son premier voyage à New York, Robert Capa convainc, avec l'aide de son agent Léon Daniel, les éditions Covici-Friede de publier Death in the Making, un album d'une centaine de photos réalisées en Espagne. Il s'agit de reportages que Gerda Taro et Robert Capa ont effectué ensemble ou séparément entre et , pour les hebdomadaires Vu et Regards, ainsi que pour le quotidien Ce Soir dirigé par Louis Aragon. La préface est signée du journaliste du Chicago Tribune Jay Allen, la maquette, du photographe hongrois André Kertész. L'album paraît au début de l'année 1938. Après Gerda, le roman de Pierre-François Moreau publié en 2018 restitue cet épisode de la vie de Robert Capa. L’amour était presque parfait, le roman de Jean-Michel Thénard publié en 2023 revient également sur cet épisode de la vie de Robert Capa avant sa rencontre avec l’actrice Ingrid Bergman.

La valise mexicaine

En 2007, une valise retrouvée à Mexico, contenant 4 500 négatifs de Gerda Taro, Robert Capa et David Seymour réalisés au cours de la guerre d’Espagne, permet de considérer sous un nouvel angle l'importance du travail de Gerda Taro et sa relation professionnelle avec Robert Capa. En effet, certaines photographies attribuées à Capa seraient en fait l'œuvre de Taro[4],[5].

Postérité et hommages

Romans

  • Pierre-François Moreau Après Gerda, Les Éditions du Sonneur, Paris, 2018 (ISBN 978-2-37385-079-6)
  • Helena Janeczek, La Fille au Leica (it) (La ragazza con la Leica), Actes Sud, Paris, 2018 (ISBN 978-2-330-11380-3)
  • Serge Mestre, Regarder, Sabine Wespieser, Paris, 2019 (ISBN 978-2-848-05304-2).
  • Isabelle Mayault, Une longue nuit mexicaine, Gallimard et Folio, Paris, 2019 (ISBN 978-2-07-288171-8).
  • Alice Zeniter, Comme un empire dans un empire, Flammarion (ISBN 978-2-0815-1543-7) p. 158
  • Olivier Weber, Dans l’œil de l'archange, Calmann-Lévy, Paris, 2023 (ISBN 978-2-7021-6686-4)

Hommages publics

  • La mairie du 14e arrondissement et la Ville de Paris ont décidé l'apposition en 2014 d'une plaque commémorative officielle en sa mémoire, ainsi que celles de Robert Capa et David Seymour, sur l'immeuble où ils ont tous trois travaillé, au 37 rue Froidevaux[13].
  • La mairie du 13e arrondissement de Paris a présenté en 2019 une exposition en sa mémoire[14].
  • En son hommage, le 13e arrondissement de Paris et la Ville de Paris ont décidé de nommer une nouvelle voie rue Gerda-Taro en 2019[15].
  • Il existe également d'autres odonymes à son nom : une place à Stuttgart, une allée à Villeurbanne, une rue à Madrid et une école à Leipzig.
  • En 2022, son travail est présenté dans le cadre de l'exposition Femmes photographes de guerre au musée de la Libération de Paris - musée du Général Leclerc - musée Jean-Moulin, à Paris[16].

Musique

En 2012, le groupe anglais Alt-J sort une chanson intitulée Taro. Elle raconte la mort du photographe Robert Capa, compagnon de Gerda Taro, tué par une mine pendant la guerre d'Indochine.

Internet

Le , Google a rendu hommage à Gerda Taro sur la page d'accueil de son moteur de recherche, avec un Doodle montrant une illustration de la photographe souriante et tenant un appareil 24x36, sur fond de négatif noir et blanc, avec la mention : « Il y a 108 ans naissait Gerda Taro »[17].

Bibliographie

  • Irme Schaber, Gerda Taro. Une photographe révolutionnaire dans la guerre d'Espagne, Monaco, Éditions du Rocher, coll. « Anatolia », 2006 (ISBN 2-268-05727-5) ; titre original (de) Gerda Taro Fotoreporterin im spanischen Bürgerkrieg
  • François Maspero, L'Ombre d’une photographe, Gerda Taro, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Fiction et Cie », 2006 (ISBN 2-02-085817-7)
  • Susana Fortes, En attendant Robert Capa, Éditions Héloïse d’Ormesson, 2011, (ISBN 2350871533)
  • Jane Rogoyska, Gerda Taro. Inventing Rober Capa, London, Johnathan Cape, 2013, (ISBN 9780224097130)
  • (en) Ruth Styles, « Dramatic story of 1930s pioneer Gerda Taro, the first female photographer to die in battle, brought to life in new book », Daily Mail, (lire en ligne, consulté le )
  • Helena Janeczek La fille au Leica, Arles, 2018 Actes Sud, , 384 p
  • Olivier Weber, Dans l'oeil de l'archange, Calmann-Lévy, 2023.

Documentaires

  • Patrick Rotman, La Tragédie des Brigades Internationales, Arte, 2016, où il est plusieurs fois question de Robert Capa et Gerda Taro voir en ligne.
  • Sigrid Faltin, Femmes photographes de guerre, 52 minutes, Allemagne, 2014, diffusé sur Arte, . Un portrait de quatre femmes, figures majeures de la photographie de guerre : Alice Schalek, Gerda Taro, Lee Miller, Camille Lepage[18].
  • Sur les traces de Gerda Taro, documentaire de Camille Ménager, 2020, 60 min[19].

Notes et références

  1. « La fille au Leica », sur France Culture (consulté le )
  2. 1 2 3 « Gerda Taro, le sourire caché d’une jeunesse immortelle », sur L'Humanité,
  3. 1 2 Thomas Michael Gunther, Marie de Thézy, Alliance Photo, agence photographique 1934-1940. Cat. exp, Bibliothèque historique de la Ville de Paris, 1988-1989. Paris : BHVP, 1988.
  4. 1 2 Ruth Styles 2013, p. 1
  5. 1 2 Alain Esterzon, « Gerda Taro, la fille au Leica », sur revues.be (consulté le )
  6. Mlle Taro, correspondante de Ce Soir, tuée sur le front de Brunete, Le Droit du Peuple (Quotidien socialiste Genève-Lausanne) (page 2), 29 juillet 1937. Archive Scriptorium de la Bibliothèque cantonale et universitaire (Lausanne)
  7. Les dangers du métier, Feuille d'Avis de Lausanne (page 18), 27 juillet 1937. Archive Scriptorium de la Bibliothèque cantonale et universitaire (Lausanne)
  8. Ce soir du 28 juillet 1937 lire en ligne sur Gallica
  9. Laurent Gervereau, Histoire du visuel au XXe siècle, Seuil, , p. 154
  10. « Leur amie Gerda Taro, cinéaste et photographe, épouse de Robert Capa, périt, elle, […], sur le front de Brunete. Le troisième voyage espagnol de [Paul] Nizan, cette année-là, fut pour ramener en France le corps de Gerda [Taro]. » – Pascal Ory, Nizan destin d’un révolté, édition Complexe, Bruxelles, 2005 (ISBN 2-8048-0029-6), p. 151.
  11. Irme Schaber, Richard Whelan et Kristen Lubben, Gerda Taro=, International Center of Photography, , p. 31.
  12. Paul Bauer, Deux siècles d'histoire au Père Lachaise, Mémoire et Documents, , 867 p. (ISBN 978-2-914611-48-0), p. 740
  13. « Conseil de Paris » (consulté le )
  14. « Le Salon de la Photographie du 13ème rend hommage à Gerda Taro », sur 9 Lives Magazine, (consulté le )
  15. « Délibération du Conseil de Paris » (consulté le )
  16. « Exposition / Femmes photographes de guerre », sur museeliberation-leclerc-moulin.paris.fr, (consulté le ).
  17. (en) « Gerda Taro’s 108th Birthday », sur www.google.com (consulté le )
  18. « film-documentaire.fr - Portail du film documentaire », sur www.film-documentaire.fr (consulté le )
  19. « « Sur les traces de Gerda Taro », sur France 5 : la courte et intense vie d’une pionnière du photojournalisme », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

  • Soldate républicaine à Barcelone
  • Guerre
  • Journalisme
  • Photojournaliste
  • Agence photographique
  • Photographe de guerre
  • Place des femmes dans la photographie
  • Droits des femmes en Espagne
  • Lina Òdena
  • Pepita Laguarda Batet

Liens externes