La notation musicale est la transcription sur un support d'une œuvre musicale afin de la conserver, de la diffuser et de l'interpréter ultérieurement.
D'une manière générale, quelles que soient les époques et les civilisations, on peut définir l'écriture musicale comme étant un procédé de notation qui met en relation un système et un code. Le code d'un système musical décrit celui-ci en lui associant un certain nombre de symboles plus ou moins contraignants pouvant définir la durée, la hauteur ou les nuances d'un son.
Notation antique
La date précise des premières écritures musicales de l'histoire de l'humanité est difficile à définir, néanmoins, on peut dire que le besoin de représenter la musique par un système de notation s'est manifesté dans la plupart des civilisations qui connaissaient une écriture.
Trente-six chants hourrites sur des tablettes d'argile sont datés approximativement de 1400 av. J.-C.[1].
Dans les textes grecs (traités de musicographes et témoignages d'époque hellénistique ou romaine) les premières traces de partitions sont datées précisément de 408 et de 405 av. J.-C. (celles de l'Oreste et de l'Iphigénie à Aulis d'Euripide) et transmises sur des papyrus grecs datant de 360/350 av. J.-C. On a également découvert l'existence d’une écriture musicale ancienne du IIIe siècle av. J.-C. qui fait des Grecs les premiers Européens à avoir utilisé un tel système[2].
Des formes de notations musicales étaient également connues en Asie au IVe siècle av. J.-C., elles servaient à indiquer des thèmes et des modes, mais n'étaient pas utilisées comme base d'exécution.
En Inde, une notation syllabique analogue au solfège, les svara, toujours en usage aujourd'hui, existait déjà au Ve siècle av. J.-C.[3].
Notation contemporaine
À l'époque médiévale, l'écrit connait une lente diffusion au sein de toutes les activités pour soutenir la mémoire orale défaillante. Si l'église maintient longuement sa prééminence sur l'écrit, la complexité des relations sociales et des opérations commerciales augmentant entre les XIe et XIIe siècles impose peu à peu à la société laïque de recourir à l'écriture et dès le siècle suivant celle-ci est bien intégrée dans la gestion des affaires ou la transmission du savoir.
La portée
La portée est généralement constituée de cinq lignes et quatre interlignes, sur lesquels on place principalement une clef de note et des notes de musique.
D'autres systèmes de notation utilisent un nombre de lignes différent :
- le chant grégorien est historiquement noté sur des portées à quatre lignes (voir Neume) ;
- les parties des instruments à hauteur unique ou indéterminée (tambours, cymbales, castagnettes, triangles, etc.) sont souvent écrites sur une ligne unique, puisque seul leur rythme est pris en compte.
Les tablatures
Les tablatures constituent un système de notation spécifique à un instrument donné (instruments à clavier et à cordes) par représentation graphique de la position des doigts (main gauche pour les instruments à cordes) par opposition à la notation de solfège plus courante et universelle qui indique la hauteur du son indépendamment de l'instrument. Les formes de tablatures ont varié suivant les lieux, les époques et les instruments.
Ce système de notation a été abandonné au cours du XVIIe siècle pour les instruments à clavier mais a perduré jusqu'à la deuxième moitié du XVIIIe siècle pour le luth, le théorbe et la guitare.
La notation par tablature a également été remplacée par la notation en solfège pour la guitare à la fin XVIIIe siècle avant sa réapparition au XXe siècle dans le jazz, le rock, les musiques actuelles et les musiques folkloriques.
Grilles et diagrammes d'accords
Grilles d'accords chiffrés
Ce système de notation se présente sous la forme d'une grille se lisant de gauche à droite, de haut en bas, où chaque case représente une mesure pouvant contenir un ou plusieurs accords chiffrés. Il donne des indications d'harmonie mais laisse à l'interprète une totale liberté rythmique et mélodique. C'est une des raisons pour lesquelles ce système est beaucoup utilisé en jazz, il donne aux musiciens la possibilité d'improviser. La notation dualo, dans le même esprit permet un chiffrage de gamme.
Illustration avec la grille du chant La Madelon :
Chaque cellule correspond à une mesure de 4 temps. Quand il y a deux accords dans une mesure séparés par une barre oblique, cela signifie que le 1er accord est joué sur les deux premiers temps, et le 2e accord sur les deux derniers temps.
Dans cet exemple, les accords sont désignés par leur nom anglo-saxon. Les accords majeurs sont en majuscule, les accords mineurs sont en minuscule.
Diagrammes d'accords
Les diagrammes d'accords sont principalement utilisés par les guitaristes, ils représentent une partie du manche de la guitare dans le sens vertical avec les six cordes (la plus grave est à gauche) et trois ou quatre frettes. Ils permettent à l'interprète de visualiser la position adéquate pour jouer l'accord.
Histoire
Proche-Orient ancien
La première forme de notation musicale a été réalisée sur une tablette cunéiforme, à Nippour, en Babylonie (Irak actuel), vers 1400 avant JC. Cette tablette contient des fragments d'instructions permettant de comprendre qu'elle a été composée en intervalles musicaux et écrite à l'aide d'une gamme diatonique.
Une autre tablette, datée environ de 1250 avant JC, montre une forme de notation plus développée. Bien que l'interprétation de ce système ne soit pas encore finalisée, il est clair qu'elle indique les noms des cordes sur une lyre, dont l'accord est décrit dans d'autres tablettes.
Bien qu'elles soient incomplètes, ces tablettes représentent les premières mélodies notées découvertes dans le monde.
Notation musicale occidentale
Le code du système musical occidental s'est développé au Moyen Âge et est appelé solfège. Le support qu'il utilise, la partition de musique, décrit le système en lui associant des symboles caractérisant la durée et la hauteur d'un son. Les autres composantes musicales, notamment les nuances — un son doux, un son moyen, un son fort, … —, tout aussi importantes du point de vue de l'interprétation musicale, mais qui ne se mesurent pas avec autant de précision que la hauteur ou la durée, ne peuvent se transcrire sur la partition que par des symboles « ouverts », dont l'appréciation reste confiée à l'interprète.
La notation musicale opère une discrimination au sein des musiciens, entre d'une part le compositeur, d'autre part l'interprète.
Pour l’interprétation musicale, la notation possède à la fois cet atout considérable de transmettre la création de l’auteur lui-même — encore que l’acuité des différences de transcription à travers l’édition prouve, s’il était nécessaire, que cette transmission est toujours relative —, et un penchant fixiste qui défend à l’œuvre d’évoluer, sous peine de trahir la pensée de son auteur. L'écriture de la musique représente une forme — pour ne pas dire la forme — d’abstraction par excellence. Au départ, les neumes sont constitués d'un ensemble de points ou d'accents, disposés au-dessus du texte à chanter, et destinés à jouer le rôle d'aide-mémoire, afin de permettre aux chanteurs de retrouver les inflexions de la mélodie apprise de manière orale, les vocalises des pièces en plain-chant étant de plus en plus longues.
La notation évoluera progressivement à partir du XIe siècle, pour poser les neumes sur 4 lignes de portée. Toutefois, on n'y trouve pas de barre de mesure, ni la large gamme moderne de figures de notes représentant les durées des notes. Le tout premier système de notation basé sur les notes de la gamme moderne Do-Ré-Mi, etc., élaboré par Guido d'Arezzo, ne représentait que quatre lignes, qui suffisent pour l'ambitus[4] des pièces musicales du chant grégorien.
- Notation musicale religieuse, Italie, XIe siècle.
- Notation musicale religieuse, Italie, XIVe siècle.
- Extrait de Ein' feste Burg ist unser Gott, de Martin Luther.
Notation musicale arménienne
Notation musicale asiatique
Chinoise
Musique ancienne
La musique ancienne était décrite selon des principes du dao, avec des notes yin et des notes yang.
Gongchepu
Le gongchepu est un système de notation musicale à l'aide de caractères chinois, utilisé en Chine, Corée et Japon. Il en existe différentes variantes.
Le guqinpu (古琴谱/古琴譜) spécifique aux guqin, qui a été d'abord textuel ou wenzipu (文字谱/文字譜), puis abrégé, jianzipu (zh) (减字谱 / 減字譜).
Jianpu
- Parition de jianpu
Japonaise
Elle reprend la notation chinoise.
Tibétaine
Notation musicale indienne
Notes et références
- ↑ Dennis Pardee, "Ugaritic", in The Ancient Languages of Syria-Palestine and Arabia, edited by Roger D. Woodard, 5–6. (Cambridge and New York: Cambridge University Press, 2008). (ISBN 0-521-68498-6), (ISBN 978-0-521-68498-9).
- ↑ Encyclopédie Larousse - Notation musicale
- ↑ Encyclopédie Larousse - Ethnomusicologie
- ↑ Eugène Cardine, Première année de chant grégorien, cours aux étudiants de l'Institut pontifical de musique sacrée de Rome, p. 9
Voir aussi
Bibliographie
- Jean-Yves Bosseur, Du son au signe : histoire de la notation musicale, Édition Alternatives, coll. « Écriture », , 144 p. (ISBN 2-86227-439-9)
- R. P. Joannes Thibaut, Origine byzantine de la notation neumatique de l'Église latine. (Bibliothèque musicologique III). Paris, Picard, 1907. VIII-107 pages, XXVIII planches.
- R. P. Joannes Thibaut, Panégyrique de l'Immaculée Conception dans les chants hymnographiques de la liturgie grecque. Paris, Picard, 1909. 52 pages.
- R. P. Joannes Thibaut, La Notation musicale, son origine, son évolution. Conférence au Conservatoire impérial de Saint-Pétersbourg les 11/24 février 1912. 15 pages 17 planches.
- A. Simonin, "Approche chronologique de la notation musicale" dans InOuïe - Exposition - Musée Zoologique de Strasbourg, Éditions Paraiges, Strasbourg 2013, p. 69-73.
- R. P. Thibaut, Monuments de la notation ekphonétique de l’Église latine. Exposé documentaire des manuscrits de Corbie, de Saint-Germain-des-Prés et de Pologne, conservés à la Bibliothèque Impériale de Saint-Pétersbourg. Saint-Pétersbourg 1912. XVII-104 pages, XCIV planches.
- Alban Thomas, La Notation Rythmique aux XVe et XVIe siècles, http://musiquerenaissance.free.fr/contenu.php?m=asso-pub_livrets Association "Musique à la Renaissance", .
- Sylvie Bouissou, Christian Goubault et Jean-Yves Bosseur, Histoire de la notation de l'époque baroque à nos jours, Minerve, coll. « Musique ouverte », , 294 p. (ISBN 2-86931-112-5 et 978-2869311121)
- Willi Appel (trad. Jean-Philippe Navarre), La notation de la musique polyphonique : 900-1600, Mardaga, coll. « Musique-Musicologie », , 433 p. (ISBN 2-87009-682-8, lire en ligne)
Liens externes
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- Anne Ibos-Augé, « Musiques anciennes ou pas : L’écriture musicale, des lettres aux neumes »sur le site de la revue « Le ventre et l'oreille ».
- Anne Ibos-Augé, « L’écriture musicale #2 : des neumes à la notation blanche » sur le site de la revue « Le ventre et l'oreille ».
Articles connexes
- Index des notations musicales
- Histoire de la notation musicale
- Partition
- Épitaphe de Seikilos
- Code Parsons
- Guido d'Arezzo, Notation musicale grégorienne
- Klavarskribo
- Solfège
- Notation musicale en chiffres arabes
- Système de notation musicale de Jean-Jacques Rousseau
- ABC, format de notation musicale informatique
- Music Macro Language