Un sondage d'opinion, ou une enquête d'opinion, est une application de la technique des sondages à une population humaine visant à déterminer les opinions probables via l'étude d'un échantillon confectionné par les entreprises de sondages.
En France, par exemple, les enquêtes d'opinion réalisées avant l’élection présidentielle, à l'historique désormais facilement traçables grâce à Internet, sont passées de 111 en 1981 à 293 en 2007 puis ont à nouveau triplé[1], apportant aux entreprises de sondages l'essentiel de leur notoriété[2] et suscitant un débat sur leur fiabilité[1],[3],[4].
Aspects méthodologiques
Échantillonnage
Utilisation d'un échantillon
- Soit un sondage aléatoire de grandeur et la proportion de personnes qui répondent « oui » à la question posée. Le théorème central limite dit que si est grand alors suit approximativement une distribution normale avec moyenne (la proportion dans la population) et écart-type . L’intervalle de confiance à 95 % est . Par prudence, prenons la valeur qui donne l’écart-type le plus grand. L’intervalle de confiance devient . Si on obtient . La marge d'erreur est plus ou moins 3 points de pourcentage[5].
Soit l’erreur d’estimation, c’est-à-dire la différence entre et . Pour une erreur donnée la grandeur nécessaire de l’échantillon est .
- Le sondage stratifié -qui consiste à diviser la population en plusieurs groupes et à prendre un échantillon dans chaque groupe- est préférable à un sondage aléatoire simple car l’écart-type est plus petit.
- Un sondage selon la méthode des quota n’est pas basé sur la théorie statistique et ne permet pas de calculer la probabilité d’une certaine marge d’erreur. Cette méthode postule une corrélation entre certains caractères de la population. Les caractères retenus pour former l’échantillon sont souvent le sexe, l’âge, la profession et la région. La proportion de ces variables dans la population donne des quotas qu’on applique à l’échantillon. On suppose que l’opinion de la population est corrélée avec ces variables dites de contrôle.
Un sondage selon la méthode des quotas peut donner de meilleurs résultats que ceux d’un sondage aléatoire. Entre 1970 et 1979 la moyenne des erreurs lors des élections anglaises a été de 3 points de pourcentage pour la méthode des quotas contre 6.3 points pour les sondages aléatoires[6].
Un échantillon biaisé donnera un résultat mauvais même s’il contient plusieurs millions de personnes. L’exemple le plus fameux est celui du sondage du Literary Digest en 1936.
Erreur d'échantillonnage
En statistiques, le calcul d'erreur suppose un échantillonnage au hasard. Or, les sondages se font en général en considérant un panel dit représentatif. Ceci rend plus complexe le calcul d'erreur.
Dans le cas des sondages politiques, Jérôme Sainte-Marie, directeur de BVA Opinion, estime qu'ils accusent une erreur de 2 ou 3 %[7] voire peuvent dépasser 6 %, comme les sondages relatifs à des élections primaires en France[8] en raison de la méthodologie et du faible nombre ou d'échantillons d'individus sondés. Les sondages politiques sont révélateurs de ces limites ; ainsi, des résultats de plusieurs entreprises de sondages portant sur un même domaine et sur la même période sont publiés, ce qui permet de les comparer et éventuellement de mettre en évidence certaines divergences ou contradictions concernant une même question.
À titre d'exemple, les résultats comparés des sondages des différents organismes à la même période pour l'élection présidentielle française de 2007 sont significatifs :
Entreprise de sondages | Candidat | ||||
---|---|---|---|---|---|
Nicolas Sarkozy | Ségolène Royal | Indécis | François Bayrou | Jean-Marie Le Pen | |
IFOP | 32,5 | 25,5 | 16 | 11 | |
Entreprise de sondages CSA | 28 | 29 | 17 | 14 | |
BVA | 33 | 26 | 21 | 15 | 10 |
LH2 | 33 | 25 | 19 | 14 | 13 |
TNS-Sofres | 33 | 26 | 18 | 13 | 12 |
Moyenne | 31,9 | 26,3 | 19,3 | 15 | 12 |
Écart type | 1,4 | 1,4 | 1,2 | 1,4 | 1,4 |
Si l'on considère un intervalle de confiance de 95 %, il faut multiplier les écarts types par 2,8 (3,2 pour les indécis)[9], soit une erreur entre 3,5 et 4,5 points. Si maintenant on fait figurer les intervalles d'erreur, on obtient :
Nicolas Sarkozy | Ségolène Royal | Indécis | François Bayrou | Jean-Marie Le Pen | |
Moyenne | 31,9 | 26,3 | 19,3 | 15 | 12 |
---|---|---|---|---|---|
Intervalle d'erreur | 27–36 | 22–30 | 15–24 | 11–19 | 8–16 |
Taille des échantillons
La représentativité des échantillons sur lesquels s'appuient bon nombre de sondages publiés dans les médias sont l'objet de vives discussions. Cette question est particulièrement importante dans les cas où les chiffres sont très serrés.
Ces dernières années, il est apparu qu'environ 50 % de la population ne peut pas être sondée car soit elle a seulement un téléphone portable (surtout pour les jeunes), soit parce qu'elle n'est pas présente chez elle aux heures où les sondeurs appellent[10].
Aujourd'hui un certain retour à la base du sondage de certaines entreprises de sondages qui privilégient la qualité de l'échantillonnage sur les calculs statistiques qui multiplient les marges d'erreur. Ainsi, des études média peuvent comprendre 75 000 interviews (pour la radio). D'autres, peuvent travailler sur des échantillons composés de 50 000 interviews téléphoniques avec des questionnaires qui croisent des données média avec des données de consommation et de fréquentation.
En effet l'insuffisance d'individus d'un échantillon ne peut garantir la véracité des résultats proposés par le sondage. L'idéal, comme le mentionne E. Jeanne ([11], ), est de sonder le maximum de personnes pour apporter la meilleure qualité et donc de réduire les marges d'erreur. Le désintérêt de la population pour les sondages ne facilite pas le travail des entreprises réalisant les études.
Questions propres à la méthode des quotas
Si la technique aléatoire était utilisée, le calcul des intervalles de confiance montrerait que des fluctuations aussi faibles doivent inciter à une grande prudence dans leur interprétation. D'autre part il est indiscutable que la méthode des quotas ne satisfait pas la condition rigoureuse d'indépendance à la base des sondages aléatoires, ce qui exigerait en principe d'autres approches de sa précision.
Face à ce problème, la position exprimée systématiquement à l'occasion des campagnes électorales tient en deux points : le calcul des intervalles de confiance est inapplicable et – cela demanderait un minimum de justifications – la méthode des quotas est plus précise que la méthode aléatoire.
Une autre position, plus rarement exprimée, se trouve par exemple sur le site internet d'Ipsos : si on veut fournir une indication sur la validité d'un sondage, on est bien obligé d'utiliser ce qui existe, tout en sachant que ce n'est qu'une approximation.
Il semble qu'il soit possible de renforcer un peu cette position. En effet c'est l'indépendance des réponses, difficile à assurer dans un sondage à l'échelle de la France, qui permettrait le calcul des intervalles de confiance. À l'opposé, on peut imaginer un sondage à prétentions nationales effectué dans un seul quartier, ou une seule entreprise ; celui-ci donnerait évidemment des résultats sans signification pour le pays parce qu'il y aurait probablement de forts liens entre les différentes réponses. La méthode des quotas, en contraignant les enquêteurs à interroger des personnes appartenant à divers milieux, brise un grand nombre de ces liens et ne peut que rapprocher ce type de sondage du sondage aléatoire, sans qu'on puisse mesurer la distance qui existe entre les deux.
En France, les sondages électoraux, contrairement aux autres sondages aux méthodes plus éprouvées, se passent quasiment exclusivement au téléphone fixe alors que certains sondés se sont désabonnés pour ne garder que le téléphone portable[12], d'autres ne sont guère joignables ou sur liste rouge ce qui induit un biais supplémentaire, dit « biais de sélection ».
Traitement du sondage
Corrections des résultats bruts des enquêtes
Les statisticiens, notamment en matière de sondages politiques opèrent un grand nombre de corrections des données obtenues. Par exemple, les données CVS, corrigées des variations saisonnières, tentent de corriger les effets dus à la saisonnalité du phénomène mesuré. Si certains sont particulièrement évidents - une forte baisse de l'activité économique en août n'est pas le signe d'un effondrement économique - d'autres en revanche sont plus sujets à caution.
En matière de sondages électoraux par exemple, on corrigera certains décalages entre déclaration et réalité des votes passés effectifs. On observe par exemple un décalage entre les déclarations d'intention de vote Front national et les votes réels, plus nombreux. Les statisticiens mesurent cet écart et le reportent pour les mesures suivantes afin de donner un chiffre plus représentatif de la réalité, c'est ce que l'on nomme le « redressement des résultats bruts ». Les détracteurs des sondages considèrent que l'on sort ici de la stricte mesure des déclarations d'intention de vote pour donner un chiffre ayant la prétention d'indiquer ce que les électeurs comptent faire en réalité, d'autant plus qu'aucune entreprise de sondages ne publie les pourcentages réellement exprimés ou leur multiplicateur[13].
Formulation des questions
La formulation de la question peut influencer les réponses.
Une étude menée sur trois sondages effectués au moment du bombardement de la Libye par l'armée américaine en 1986 a par exemple révélé des décalages considérables de réponse en fonction de l'intitulé de la question, certaines étaient particulièrement abstraites citant « l'action américaine contre Kadhafi » alors que de l'autre côté un magazine parlait de l'armée américaine, de bombardements et nommait les villes touchées. Avec la plus abstraite des formulations, l'événement recueillait 60 % d'assentiments, la formulation intermédiaire 50 %, la formulation la plus précise 40 %.
Ce décalage ne pose pas de problème si l'on conserve à l'esprit que les sondages mesurent une réponse à une question et non pas la réalité d'une opinion dans la population. Aux yeux de leurs détracteurs, la confusion apparaît pourtant particulièrement fréquente et très volontiers entretenue par ceux qui commandent les sondages et qui peuvent même choisir de ne pas les publier si les résultats ne correspondent pas à ce qu'ils veulent démontrer.
Il s'avère, dans la réalité du terrain, que plus une question est longue, plus elle comprend de mots et de phrases, moins elle est comprise, et donc plus le résultat est sujet à caution. Alors que quasiment tous les interviewés comprennent facilement des questions courtes. De même, les questions interronégatives sont moins aisées à comprendre. Ces deux situations font augmenter le taux de NSP (ne se prononcent pas) sur une question.
Afin de formuler des questions qui mesurent avec certitude le concept d'intérêt, Saris et Gallhofer (2007)[14] proposent une procédure en 3 étapes, qui consiste en :
- Définir si le concept à mesurer est un concept par postulation ou un concept par intuition[15] ;
- Pour chaque concept par intuition, formuler une affirmation ;
- Transformer chaque affirmation en une requête de réponse.
Cependant, la majorité des questions dans les sondages sont des questions fermées qui proposent également une échelle de réponse. Il faut donc rajouter à ce processus une étape, qui est celle du choix de l'échelle de réponse. De nombreuses décisions doivent être prises quant à la formulation exacte de l'échelle[16] qui peuvent influencer grandement les réponses[17], la qualité de ces réponses[18], et par conséquent aussi les conclusions finales[19].
Pour aider les chercheurs à décider de la meilleure formulation possible à la fois de la question elle-même et de son échelle de réponse, il existe des livres donnant des consignes générales[20],[21]. Cependant, parce que les différentes décisions sont en interaction, il est difficile de donner des consignes générales sur la manière de formuler exactement les questions d'un sondage, au-delà de quelques règles basiques (par exemple, les réponses dans l'échelle proposée doivent couvrir toutes les possibilités).
C'est pourquoi Willem Saris et collègues ont développé un programme, appelé Survey Quality Predictor (SQP), qui permet de prédire la qualité des questions en fonction de leurs caractéristiques exactes, et propose des suggestions de comment modifier la question ou son échelle pour améliorer cette qualité[22]. Ce programme peut s'utiliser gratuitement en ligne (at sqp.upf.edu) et permet d'aider les chercheurs à décider de la meilleure formulation possible pour leurs questions, en fonction du concept qu'ils veulent mesurer.
Méthode du "Rolling"
La technique dite du rolling — « rolling » en anglais — consiste à renouveler une partie de l'échantillon très souvent, ce qui permet de publier le sondage à des intervalles plus rapprochés, grâce à ce renouvellement, le plus souvent partiel.
Par exemple, à partir de , l'IFOP réalise un rolling avec un échantillon cumulé de 1 500 personnes renouvelé quotidiennement par tiers[23],[24]. Harris Interactive procède de même à partir du [25].
Aspects légaux et réglementaires par pays
En France
Droit actuellement en vigueur
Il existe un droit des sondages électoraux, qui est aujourd'hui mieux connu[26]. En effet, la loi no 77-808 du a institué un régime juridique encadrant les sondages électoraux - c'est-à-dire en rapport avec une élection prévue par le Code électoral, un référendum ou l'élection des parlementaires européens, ce qui n'inclut donc pas l'ensemble des sondages d'opinion politique - ayant fait l'objet d'une publication ou d'une diffusion[27].
Cette loi a notamment institué une Commission des sondages, autorité administrative indépendante composée de magistrats du Conseil d'État, de la Cour de cassation et de la Chambre des comptes, qui a pour mission de contrôler la qualité et l'objectivité de ces sondages et, dans le cas où une défaillance est constatée, de faire publier des mises au point - c'est-à-dire des correctifs dans les journaux visant à alerter l'opinion publique sur les défauts de ces sondages - voire de saisir le juge pénal[28]. La Commission des sondages a ainsi développé un véritable droit matériel, au contenu substantiel, visant à garantir le caractère scientifique de la méthodologie suivie par les entreprises de sondages : il existe désormais de nombreuses règles de fond applicables à l'élaboration et aux conditions de publication des sondages électoraux[29].
Le contrôle est en outre renforcé en période électorale, puisqu'il est interdit de publier des sondages la veille et le jour du scrutin, cette interdiction étant sanctionnée par une amende de 75 000 euros[30]. Le respect de cette interdiction pose toutefois aujourd'hui certains problèmes au regard des potentialités des nouvelles technologies, qui trouveront probablement leur résolution dans l'harmonisation des horaires de fermeture des bureaux de vote sur le territoire. La question se pose aussi de sa conciliation avec l'article L. 52-2 du Code électoral, qui prévoit une interdiction de diffuser les résultats avant 20 heures et qui n'est sanctionnée que d'une amende de 7 500 euros, ce qui n'est guère dissuasif, ainsi qu'avec l'article L 97 du même code[31], qui prévoit que : « Ceux qui, à l’aide de fausses nouvelles, bruits calomnieux ou autres manœuvres frauduleuses, auront surpris ou détourné des suffrages, déterminé un ou plusieurs électeurs à s’abstenir de voter, seront punis d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 15 000 euros »[32].
Si ce régime juridique semble avoir fait la preuve d'une certaine efficacité, il est aujourd'hui critiqué pour son manque de transparence. En effet, alors que les citoyens ont théoriquement le droit de consulter les notices des sondages auprès de la Commission des sondages[33], les informations effectivement fournies sont peu nombreuses en pratique[34]. Cette pratique discutable a néanmoins été validée par le Conseil d'État[35] au terme d'un raisonnement juridiquement et factuellement très contestable[36].
Pour répondre à ces critiques, le Sénat adoptait le , à l'unanimité, une proposition de loi sur les sondages visant à mieux garantir la sincérité du débat politique et électoral[37]. Certaines propositions visaient à augmenter le niveau d'expertise de la commission des sondages et à étendre son champ d'intervention à ceux qui portent sur des opinions et pas seulement sur des intentions de vote. Toutefois, l’Assemblée Nationale est revenue en arrière sur ses propositions et le projet finalement n'a pas abouti[29]. Toutefois, les travaux de la Commission de rénovation et de déontologie de la vie politique, dite Commission Jospin, qui doit rendre son rapport pour la mi-, pourraient relancer ce projet[38].
En toute hypothèse, dans l'attente de ces évolutions, c'est bien la société civile qui cherche à exercer, à côté de la Commission des sondages, le rôle de vigie afin que les sondages, dont la publication est protégée par la liberté d'expression et qui peuvent participer à l'amélioration de la démocratie lorsqu'ils sont bien utilisés, soient bien contrôlés. Plusieurs sites internet sont consacrés à cette surveillance, même si leurs positionnements idéologiques par rapport aux sondages différents[39]. Ils permettent en tout cas mieux qu'hier, de suivre au jour le jour les problématiques liées aux aspects légaux et réglementaires des sondages d'opinion.
Avant la Loi n°2002-214 du 19 février 2002
L'article 11 de la loi n°77-808 du [40] prévoyait l'interdiction des sondages d'opinion en période électorale une semaine avant le scrutin. Cette disposition a été modifiée en 2002, suivant l'argumentaire exposé à l'Assemblée nationale par le ministre de l'Intérieur de l'époque :
« M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur - L'article 11 de la loi du interdit la publication, la diffusion et le commentaire de tout sondage d'opinion ayant un rapport direct ou indirect avec une élection ou un référendum pendant la semaine qui précède chaque tour de scrutin ainsi que pendant le déroulement de celui-ci. Cette interdiction, assortie d'une sanction pénale, est cependant de plus en plus fréquemment détournée.
Tout d'abord, la loi de 1977 ne s'applique pas aux organes de presse situés hors du territoire national. Ceux-ci peuvent diffuser sur leurs sites Internet les résultats de sondages effectués dans la semaine précédant le scrutin. Ce fut le cas lors de l'élection présidentielle de 1995, au cours de laquelle fut diffusé un sondage portant sur le second tour du scrutin. Lors des législatives de 1997, certains médias indiquèrent même à leurs lecteurs les adresses de sites Internet étrangers livrant les résultats de ces sondages.
À ces situations de fait s'est ajoutée une difficulté juridique. Saisis de recours fondés sur l'incompatibilité de l'article 11 de la loi du et de l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales - qui consacre le droit de toute personne à la liberté d'expression, celui-ci incluant la liberté de recevoir et de communiquer des informations ou des idées -, le Conseil d’État en 1995 et 1999 et la Cour de cassation en 1996 avaient jusqu'alors débouté les requérants.
Un récent revirement de jurisprudence de la Cour de cassation est toutefois intervenu. Par un arrêt rendu le , celle-ci a en effet jugé qu'« en interdisant la publication, la diffusion et le commentaire, par quelque moyen que ce soit, de tout sondage d'opinion en relation avec l'une des consultations visées par l'article premier de la loi du , les textes fondant la poursuite instaurent une restriction à la liberté de recevoir et de communiquer des informations qui n'est pas nécessaire à la protection des intérêts légitimes énumérés par l'article 10-2 de la convention ». Il en résulte que la méconnaissance des dispositions de l'article 11 de la loi du ne peut plus, aujourd'hui, faire l'objet d'une sanction pénale, quel que soit le moment de la diffusion du sondage.
Le Conseil supérieur de l'audiovisuel a, pour sa part, fait observer dans sa recommandation du , que la diffusion de sondages interdits pourrait être considérée par le Conseil constitutionnel comme de nature à altérer la sincérité du scrutin et avoir donc d'importantes conséquences électorales. Le juge de l'élection est en effet naturellement attentif à tout ce qui peut affecter le comportement des électeurs et la diffusion de sondages pendant la période d'interdiction pourrait, en cas de faible écart de voix notamment, valablement motiver l'annulation d'un scrutin.
Le présent projet de loi substitue à l'interdiction d'une durée d'une semaine prévue par l'article 11 de la loi du , une interdiction qui ne commencera à courir qu'à compter de la veille du scrutin, soit le vendredi à minuit. Cette interdiction s'appliquera également aux sondages ayant déjà fait l'objet d'une publication, d'une diffusion ou d'un commentaire avant la veille de chaque tour de scrutin. »[41]
Critique
Principaux biais
Biais de non-neutralité des sondeurs
L'impartialité des entreprises de sondages est de plus en plus questionnée[42]. Dès 2007, Le Figaro a constaté un mouvement de concentration des entreprises de sondages, désormais détenues par des groupes financiers[43]. L'entrepreneur Vincent Bolloré, ami proche du Président Sarkozy, détient l'intégralité du capital de CSA-TMO après le rachat des parts de Roland Cayrol[44] tandis que l'actuelle présidente du MEDEF, Laurence Parisot, était présidente de l'IFOP.
La définition de la problématique, le choix des sujets abordés, la formulation des questions, ne sont plus confiés à la société civile (associations, syndicats, intellectuels) qui possède une réflexion formée sur le sujet mais plutôt à des groupes de presse et de télévision appartenant à des hommes d'affaires.
Deux exemples sont souvent cités :
- François Bayrou a raillé les entreprises de sondages, qui le plaçaient en dessous de Jean-Marie Le Pen le [45], alors qu'il a fait 8 points de plus (18,5 % contre 10,5 %) le soir du 1er tour, le . En 2012, il réclame que les candidats rendent publics les budgets qu'ils y consacrent et le nom des instituts bénéficiaires[45]. Il dénonce les résultats des instituts Ifop Fiducial et TNS-Sofres-Sopra présentant favorables à Nicolas Sarkozy et François Hollande[45].
- la semaine précédant le deuxième tour de l'élection présidentielle de 2007, les principales entreprises de sondages donnent toutes Nicolas Sarkozy gagnant avec entre 5 et 9 points d'écart avec Ségolène Royal, alors qu'une petite entreprise de sondages, 3C Études, pratiquant la même méthode des quotas, aussi sérieusement, donne Nicolas Sarkozy à égalité avec Ségolène Royal[46].
À la suite de la croissance du nombre de sondages publiés, des sites se proclamant indépendants, comme « Délits d'opinion »[47] ont lancé une pédagogie des enquêtes d'opinion en faisant appel aux professionnels des entreprises de sondages, aux politologues ainsi qu'aux acteurs économiques et politiques.
Biais de négligence de l'électorat jeune et populaire
La biais le plus souvent évoqué est de « sous-représenter un électorat moins politisé et moins informé, généralement plus jeune, qui ne se décidera qu’au dernier moment »[1]. Ainsi, en février 2022 comme en février 2017, près de 4 Français sur 10 ne savaient pas encore pour qui voter à la présidentielle, et parmi eux 2 sur 10 pourraient s’abstenir, selon une étude Kantar Public - Epoka[48]. Le biais vient du fait que les instituts mesurent le plus souvent seulement ceux qui ont une certitude d'« intention de vote »[3]. Au plan sociologique, les électeurs « qui se décident le plus tard sont essentiellement dans les catégories populaires »[4]. Les sondages ne portent, sauf exception, que sur les personnes « certaines » d’aller voter[3], en proposant au sondé de se situer sur une échelle de 1 à 10[3], ce qui réduit parfois l’échantillon des répondants de moitié[3] et le concentre sur un profil sociologique moyen plus socialement favorisé[3], plus âgé[3], et plus politiquement motivé que l’ensemble de la population par la politique en général ou par l'actualité du moment[3].
Par ailleurs, les différents instituts n'ont pas la même définition de la « certitude » d'aller voter[3]: en France, pour Ipsos-Sopra Steria et OpinionWay, seule la note 10 garantit la certitude d’aller voter[3], alors pour l'Institut Elabe c’est dès le 8[3]. Les intentions de vote des électeurs « certains » d’aller voter écartent les indécis[3], les incertains[3], et ceux qui le plus souvent, ou bien dans un contexte particulier, ne se décident que tardivement[3]. Ainsi, « une catégorie d’électeurs passerait systématiquement sous les radars » des instituts de sondages[4].
Biais de sélection des candidats
Les sondages peuvent inciter à se présenter à une élection. Ainsi, portés par les sondages, Edouard Balladur et Raymond Barre se sont présentés aux présidentielles de 1995 et 1988, mais ont finalement perdu.
L'alternative à la sélection des candidats par les sondages est le recours à une élection primaire pour désigner le candidat de chaque parti, jusqu'à un an avant l'élection, et permettre aux personnalités et militants de ce parti de s'unir dans la campagne, les divergences ayant été débattues en amont, avant l'élection primaire. À partir de 2011 se sont tenues des élections primaires en France qui ont opté pour le libre accès aux non-adhérents. Le grand nombre de participants, 2,66 millions au 1er tour et 2,86 millions au second pour la Primaire citoyenne de 2011, commune au PS et au PRG, amenant les partis LR, PCD à mettre sur pied cinq ans après la Primaire ouverte de la droite et du centre qui a réuni respectivmeent 4,30 millions et 4,40 millions de participants.
Biais dans la fiabilité des réponses
La critique des sondages montre que les réponses apportées par les sondés ne présentent aucune garantie de véracité[49]. Plusieurs phénomènes peuvent biaiser les réponses des sondés qui :
- n'ont pas d'idées formées sur les questions et répondent au hasard, pour le privilège d'être sondé ;
- trouvent le questionnaire trop long, s'ennuient, pensent à autre chose et répondent au plus vite ;
- répondent en fonction des idées qui circulent dans leur entourage proche[50];
- répondent en fonction des résultats qu'ils aimeraient voir publiés ;
- n'assument pas la réalité de leur opinion ou pratique, préférant quelque chose de plus consensuel.
Répondre à un sondage donne la gratification de pouvoir déterminer la réalité sociale, même sans avis personnel jusque là sur la question. Les sociologues ont observé que trois échantillons représentatifs peuvent exprimer des réponses opposées sur un même sujet, en fonction de la façon de poser la question.
Lorsque l'interviewé répond « je ne sais pas » il est parfois sollicité avec insistance car l'enquêteur a pour consigne de le « relancer ». Malgré ce biais, l'addition de toutes les réponses fait comme si elles avaient toutes la même valeur, qu'elles soient spontanées ou obtenues en insistant[51],[52].
Les sondages par Internet présentent le biais de représenter plus facilement les personnes motivées par l'actualité[53].
Biais d'interprétation par les médias
Le 6 février 2014 un sondage BVA dans Challenges, diffusé sur BFM TV, mesure ce que pensaient les Français des récentes mesures économiques du président de la République François Hollande. Pour le site de BFM-TV, « le pacte de responsabilité ne convainc pas les Français »[54], alors que pour le site de Challenges, « le "pacte" de Hollande ne convainc qu’à moitié les Français »[55]. À l'inverse, avec les mêmes chiffres, le site du Figaro conclu de son côté que « les Français approuvent le pacte de responsabilité »[56].
Pour Frédéric Lemaire, dans un article publié en sur le site de l'association de critique des médias Acrimed, cette situation illustre la propension des commentateurs médiatiques à « voir le verre à moitié vide, ou à moitié plein » en fonction de leurs intérêts[57].
Influences sur la démocratie
Effet sur le vote
La sociologie électorale distingue différents effets:
- L'effet bandwagon, ou effet contagion, décrit le phénomène selon lequel la probabilité qu'une croyance, une idée, un comportement, soit adopté augmente en fonction de la proportion d'individus l'ayant adopté auparavant[58].
- L'effet underdog ou effet outsider est l'effet inverse. Littéralement effet challenger, il consiste en une sympathie pour le candidat donné perdant, ou une incitation à se remobiliser pour le camp annoncé dans ce cas[59].
- Les effets humble-the-winner (démobilisation des électeurs qui pensent que le candidat va gagner)[60] et snob-the-loser (démobilisation des électeurs qui pensent que l'élection est perdue)[60].
- L'effet de décalage entre les derniers de sondage et le résultat le soir du vote, avec une atténuation des victoires et une relativisation de la défaite, analysé par Jérôme Sainte-Marie[61].
Création d'une « démocratie d'opinion »
Les politologues parlent de l'avènement d'une démocratie d'opinion, ou sondagière, via un lien quasi instantané entre gouvernants et peuple, s'opposant à la démocratie représentative et l'emportant sur les partis politiques et syndicats. Un mouvement social pourrait être ainsi discrédité s’il n’est pas soutenu par une majorité de personnes sondées.
Cet avènement influerait sur la communication politique : coups de communication (petites phrases, vidéos, tweets, interventions au Parlement, dans les médias, dans les manifestations) pour conquérir l'opinion par son image plus que par les idées.
Les hommes politiques seraient amenés à suivre l’opinion majoritaire, plutôt qu'un projet politique réfléchi et cohérent, et à abandonner les mesures discréditées dans les sondages.
Pour Jacques Le Bohec, professeur en sciences de l'information et de la communication, ils « rythment de plus en plus fortement la dramaturgie électorale » et favorisent la démocratie d'opinion car cette forme d'enquête, malgré ses nombreux biais techniques, reste auréolée du prestige du chiffrage[62].
Les sondages, en transformant une « opinion publique » globalisée en acteur central de la vie politique, sur le thème « les Français pensent que » (dans le cas de la France), favoriseraient le consensus, le conformisme et feraient taire les opinions divergentes, d'où l'accusation d'instrumentalisation et de manipulation. Pour le politologue Patrick Champagne, les sondeurs pourraient correspondre à des « faiseurs d'opinion ». Ils contribueraient à dicter l'agenda médiatique et à organiser les débats.
Par exemple, la photo d'Alan Kurdi, jeune migrant mort en mer, a donné lieu en France à des sondages immédiats, accusés d'instrumentaliser l'émotion sans effet durable, faisant croire que les Français étaient devenus majoritairement complaisants à l'accueil de réfugiés, ce qui n'a pas été le cas ensuite.
Histoire de la critique des sondages
Années 1930
Les sondages d'opinion politiques naissent après le développement de cette technique en marketing, selon Loic Blondiaux[63]. Le journaliste G.H. Gallup fonde l'« American Institute of Public Opinion » à l'occasion de l’élection présidentielle américaine de 1936. Puis en 1937, l'organisme de recherches Mass-Observation fondé à Londres, lance une série d'enquêtes auprès de centaines de volontaires.
En France, la première enquête d'opinion est lancée en par l'IFOP (Institut Français d'Opinion Publique) de Jean Stoetzel. Sa revue Sondages demande aux sondés « Faut-il mourir pour Dantzig ? » en juin, juillet et et le 22 juillet 1939 paraît dans Paris-Soir le premier sondage d'opinion français diffusé par la presse[64],[65]. Il est réalisé par le Centre d'études de l'opinion publique[66], créé par Alfred Max[67], peu avant que la publication de sondages ne soit interdite par la censure[68].
Années 1940
Les critiques des sondages d'opinion sont anciennes. Dès 1943 Jean Stoetzel dans sa thèse consacrée à la « Théorie des opinions »[69] met en garde contre le caractère parfois dangereux et abusif de l'enquête d'opinion : celle-ci porte en effet sur des éléments souvent éphémères, insincères, vagues ou incompréhensifs et de surcroît traités par des enquêteurs dont la neutralité n'est pas toujours assurée. De plus, sur le fond, l'enquête va à l'encontre de la règle-postulat en sociologie, « à savoir que la motivation consciente de nos actes n'a rien à voir avec leur véritable causalité ». En 1948, un autre psycho-sociologue, Herbert Blumer s'interroge également à leur propos[70] tandis que Bourdieu affirme en 1973 dans un article des Temps modernes « L'Opinion publique n'existe pas ».
Années 1960
Les années 1960 voient l'arrivée dans la vie publique du référendum populaire. Les sondages, en suivant le modèle du référendum ont permis de construire une notion d'opinion publique qui demeure une construction idéologique attribuant une et une seule opinion à une société perçue comme un phénomène simple et unifié. Elle n'est pourtant pas une personne, elle est constituée de structures, de groupes aux compétences et aux connaissances variées. La capacité de construire une opinion, de connaître un sujet n'est pas uniformément répartie dans la population. Le sondage donne pourtant une forme prédéfinie à la question et place toutes les opinions sur un pied d'égalité.
À partir de la fin des années 1960, alors que la place des sondages s’accroît considérablement avec l'essor de la communication politique, une loi est promulguée pour réglementer la fabrication et la diffusion des sondages d'opinion en période électorale (loi no 77-808 du , modifiée le [71]). Le souci du législateur est de protéger la libre détermination du corps électoral d'une influence démesurée des sondages en les interdisant la semaine précédant le scrutin (période ramenée à 1 jour depuis 2002) et en créant une autorité de régulation, la Commission des sondages.
Années 1970
En bref, les sciences humaines sont divisées sur la notion d'opinion publique, depuis leurs origines. Pas moins d'une cinquantaine de définitions en ont déjà été données, dont certaines ne pourront jamais être conciliées avec d'autres ce qui semble rendre illusoire de croire qu'il existe une opinion publique simple et établie, ce que pourtant prétendent faire les entreprises de sondages.
Pierre Bourdieu a pointé ce danger dans un article de 1973 intitulé L'opinion publique n'existe pas[72].
Années 1990
En 1990, dans « Faire l'opinion, le nouveau jeu politique »[73], le sociologue Patrick Champagne estime que des professions para-politiques (sondeurs, journalistes, chercheurs) se sont emparées des sondages pour imposer leur vision du monde, via leur propre interprétation de ce que veut le peuple et en 1997 Loïc Blondiaux parle « d'OPA sur la notion d'opinion publique »[74] : le principe de la démocratie représentative ne consiste à faire trancher les votants qu'après un débat entre positions majoritaires mais aussi minoritaires, assuré par des représentants, experts et militants.
Les grèves massives de la fin 1995 en France ont lieu quelques mois après une grosse erreur des sondeurs lors de l'Élection présidentielle française de 1995, remportée par Jacques Chirac, qui élimine son rival de droite le premier ministre Edouard Balladur au premier tour[75].
A trois mois de la présidentielle, début février 1995, les sondages donnaient pourtant Balladur en tête au premier tour avec 29% des voix[75], devant Lionel Jospin (24%)[75], très loin aussi devant Jacques Chirac (16%)[75], et élu au second dans un fauteuil avec 58% contre 42% à Jospin[75]. Mais finalement Jacques Chirac (20,84%) arrive avec deux points de demi devant Balladur (18,5%) au premier tour[75] et l'emporte largement au second tour contre Lionel Jospin pourtant en tête au premier tour avec 23,3%[75].
Années 2000
Présidentielle 2002
Lors de la présidentielle 2002, les prévisions erronées des sondeurs ont fortement écorné leur crédibilité[76]. À 90 jours du scrutin, Ipsos donnait au président de la République Jacques Chirac 28% au premier tour contre 24% à Lionel Jospin, son Premier ministre, très loin devant Jean-Pierre Chevènement 10% et Jean-Marie Le Pen 8%. Les deux premiers feront 36% à eux deux , soit 18 points de moins que ce qui leur était promis. Toutes les enquêtes d'opinion, y compris celles menées la semaine précédant le premier tour du , prévoyaient encore sans ambiguïté un second tour opposant Lionel Jospin à Jacques Chirac[77].
Finalement, c'est Jean-Marie Le Pen qui a accédé au second tour avec un score plus que doublé par rapport à celui promis en février. Prévenu de sa montée, Jospin aurait refusé de changer sa campagne et montrer son affaiblissement[78]. L'argument généralement avancé par les sondeurs est que les sondages sont une « photographie » de l'opinion, et non pas un outil de prédiction.
Présidentielle 2007
Le leader centriste François Bayrou avait critiqué au cours de cette campagne avec virulence les sondeurs, qui le plaçaient en dessous de Jean-Marie Le Pen encore le [45], alors qu'il a fait 8 points de plus (18,5 % contre 10,5 %) le soir du 1er tour, le [45]. Les sondages sur l'élection présidentielle française de 2007 furent marquées par cette percée éclair de Bayrou: encore à 10% en moyenne fin janvier avant de décoller le mois suivant pour culminer à 24% le 7 mars (CSA), 23% le 9 mars (IFOP) et le 15 mars (Sofres), et 22,5% le 22 mars et 22% (LH2) le 19 mars, puis finir à 18,5%. A gauche, Ségolène Royail, un temps distancée par François Bayrou dans certains sondages avait finalement bénéficié du vote utile au détriment de José Bové, Dominique Voynet (EELV) et Marie-Georges Buffet (PCF).
Législatives de 2007
Les législatives de 2007 ont mis en difficulté les sondeurs opérant par rapport au débat politique national[79] alors que ces élections obéissent à d'autres logiques plus locales, dans les 577 circonscriptions, toutes différentes. Enfin, depuis les années 2000, les sondages sont principalement réalisés par Internet à partir de bases de données créées et administrées par les instituts eux-mêmes où des volontaires viennent s'inscrire eux-mêmes. Or, pour Jean Chiche, statisticien au CEVIPOF, « En statistique il n'est jamais bon de travailler sur des échantillons de volontaires car ils peuvent être plus sensibles aux thématiques des enquêtes, plus en adéquation avec le système »[80]. Jean Chiche ajoute qu'avec cette méthode basée sur le volontariat, « une partie de plus en plus importante de la population va passer au travers ».
Enfin, pour motiver les volontaires, les sondeurs leurs remettent des gratifications, c'est-à-dire des cadeaux, des bons d'achat ou de petites rémunérations, risquant ainsi d'entraîner une professionnalisation des sondés[80],[81].
Années 2010
Présidentielle de 2012
Les sondages se sont aussi largement trompés lors de l'élection présidentielle française de 2012, d'abord marquée par la suprématie des candidats socialistes : LH2 en va même jusqu'à créditer Dominique Strauss-Kahn d'une avance de 30 points sur Nicolas Sarkozy avec 65 % d'intentions de vote au second tour. François Hollande et Martine Aubry, autres candidats potentiels du PS, bénéficient d'avances presque aussi élevées, mais au soir du second tour François Hollande n'aura finalement que 3 points de plus que Nicolas Sarkozy. Un sondage BVA en crédite François Hollande de 16 points d'avance au premier tour et de 28 au second et plusieurs sondages placent même la candidate du Front national, Marine Le Pen, devant le président sortant, mais Nicolas Sarkozy s'est finalement qualifié, avec seulement un point de moins que son rival François Hollande au premier tour.
Dans le vote final, les « petits candidats » sont victimes du "vote utile" et ne dépassent guère les 2 %, y compris Eva Joly, qui avait frôlé la barre des 10 % dans un sondage en 2011, à l'exception de Jean-Luc Mélenchon, qui passe d'environ 6 % début janvier[82] et 7% à 8 % en février, à 17 % à moins de deux semaines du premier tour[83] contribuant à l'érosion des intentions de vote en faveur du candidat socialiste même s'il retombe finalement.
Présidentielle de 2017
Lors de l'élection présidentielle française de 2017, les sondages effectués en février placent Benoit Hamon, vainqueur de la primaire socialiste, dans une fourchette de 15-17%, soit 9 à 11 points de plus que son résultat final. Il était alors environ six points devant Jean-Luc Mélenchon puis les courbes se sont croisées à la mi-mars, avant une envolée de Jean-Luc Mélenchon fin mars, qui l'amène à 19,6%, 9 points de plus que début février et seulement un point et demi du 2ème tour, où c'est Marine Le Pen qui se qualifie mais avec seulement 21% contre 25% en moyenne encore dans les sondages début avril[84],[85].
Européennes de 2019
Avant les européennes de 2019, les sondages donnaient en moyenne 8,5% à EELV qui a fait finalement 13,5% et 13,5% à LR qui le jour du vote n'a fait que 8,5%, une double erreur de 5 points, expliquée par le biais d'un vote des jeunes finalement plus important que prévu, même si beaucoup d'entre eux ne répondaient peu aux sondeurs.
Dans les années 2010, les sondages font de plus en plus face à un électeur imprévisible : participation intermittente, ou d’une élection à l’autre, fluidité électorale, vote caché, problèmes de fidélité des réponses à l'opinion politique. D'où le recours à un autre type d'analyse prédictive, les marchés de prédiction mais ces deniers ont également des problèmes de fiabilité[86].
Années 2020
Régionales de 2021
Comme ses concurrents, l'Ifop avait estimé l’abstention le vendredi précédent le premier tour des élections régionales à 60 %, très en dessous des 66,72 %, ce qui a selon eux expliqué aussi l'écart entre les prévisions des instituts et les résultats, notamment pour le Rassemblement national, dont les scores dans la plupart des Régions ont été plus bas que prévu[87]. Selon Frédéric Dabi, le responsable de l'Ifop, pour tenir compte de cette difficulté il faut parfois remonter ou baisser de quelques points un candidat ou un autre. Par ailleurs, selon lui, l'arrivée d'Internet a facilité le travail permettant de créer de base de données de consommateurs affiliés à différentes marques commerciales permettant de trouver plus facilement de quoi constituer un échantillon, sans passer par « une fastidieuse recherche par téléphone » et autant d'enquêteurs qu'avant.
Notes et références
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- ↑ Édouard Lecerf (TNS Sofres) et Jérôme Sainte-Marie (CSA) dans l'émission Ligne j@une du 9 mars 2011 sur www.arretsurimages.net
- 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 "Élection présidentielle 2022 : biais et disparités méthodologiques des intentions de vote" par Bruno Cautrès, chercheur au CNRS et au Cevipof-Sciences Po, Le Monde, 10 octobre 2021
- 1 2 3 "Présidentielle : les sondeurs en quête des électeurs cachés" par Valérie de Senneville, Les Échos, 17 avril 2017
- ↑ En général, soit
- la probabilité selon la distribution normale, on a et la marge d’erreur .
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- ↑ "Jean-Luc Mélenchon est-il mieux parti en 2022 qu'en 2017?" par Anthony Berthelier le 3 février 2022 dans le Huffington Post
- ↑ Jacques Tiberi, « Si les sondages ne marchent pas, les marchés prédictifs peuvent-ils être la solution? », Slate.fr, (lire en ligne, consulté le )
- ↑ « Aujourd'hui, notre défi est d'identifier l'abstention cachée » : reportage à l’Ifop après le raté des sondeurs, par Arnaud Focraud dans le JDD le 27 juin 2021 .
Annexes
Articles connexes
- Technique des sondages
- L'intelligence sociale
- Les sondages en sciences humaines.
- Bibliographie pour les méthodologies pratiques en sociologie
- Push poll (en)
- Opinion publique
- Entreprise de sondages
- Cote d'avenir
Bibliographie
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- Romain Rambaud, Le droit des sondages électoraux, Paris, l'Harmattan, coll. « Logiques juridiques », , 306 p. (ISBN 978-2-296-96113-5)
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- Frédéric Micheau, La prophétie électorale : les sondages et le vote, Éditions du Cerf,
- Michel Lejeune, La Singulière Fabrique des sondages d'opinion, L'Harmattan, 2021, 168 p.
- Frédéric Micheau, Le sacre de l'opinion - Une histoire de la présidentielle et des sondages, éditions du Cerf, 2022.
Liens externes
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- Cours de Conception et administration de questionnaires pour les sondages
- La Commission des Sondages, chargée du contrôle des entreprises de sondages