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Yehudi Menuhin
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Yehudi Menuhin en 1976.
Naissance
New York City (État de Drapeau de l'État de New York New York - Drapeau des États-Unis États-Unis)
Décès
Berlin (Drapeau de l'Allemagne Allemagne)
Activité principale Violoniste
Activités annexes Chef d'orchestre
Années d'activité 1921-1999
Maîtres Louis Persinger, Georges Enesco et Adolf Busch
Ascendants Moshe Menuhin (en)
Marutha Menuhin
Famille Hephzibah Menuhin
Yaltah Menuhin (sœurs)

Yehudi Menuhin est un violoniste et chef d'orchestre britannique (il sera fait baron Menuhin of Stoke d'Abernon en reconnaissance de ses talents musicaux) d'origine américaine, né le à New York et mort le à Berlin. Il est un enfant prodige, se produisant dès 1927 à Paris avec l'Orchestre Lamoureux et à New York au Carnegie Hall. Il est considéré comme l'un des plus grands violonistes du XXe siècle.

Biographie

Son père, Moshe Menuhin (en)[1], et sa mère, Marutha, se rencontrent à Jaffa, puis, plus tard, par hasard, à New York, où ils se marient et ont leur premier enfant. Sa mère l'appelle Yehudi, afin qu'il n'y ait aucune ambiguïté sur ses origines juives[2]. En 1917, la famille déménage à San Francisco où le père est surintendant de plusieurs écoles hébraïques. Appréciant la musique classique, ils vont écouter l'orchestre symphonique de San Francisco. Yehudi, qui n'a encore que trois ans, est impressionné par le violoniste Louis Persinger. Deux sœurs naissent, Hephzibah et Yaltah. Yehudi s'ennuie à l'école et, vers cinq ans, sa mère décide de l'en retirer, lui donnant un enseignement à domicile et commençant à lui faire apprendre le violon sérieusement. Après avoir essayé plusieurs professeurs, on sollicite Louis Persinger, qui finit par accepter. Les premiers mois sont durs. Yehudi se demande « Quand serai-je capable de vibrer ?[2] » Il persévère, étudiant tous les jours, le matin et l'après-midi car « il faut le faire tous les jours, il faut que ce soit aussi facile et naturel pour l'artiste que de voler pour un oiseau, et on n'imagine pas un oiseau dire : eh bien, je suis fatigué aujourd'hui, je ne vais pas voler »[2]. À San Francisco, il gagne 200 dollars en jouant le 2e mouvement du concerto de Mendelssohn, dans le seul concours de violon auquel il participera.

Yehudi Menuhin à 12 ans.

En 1927, Yehudi Menuhin devient l'élève de Georges Enesco et Yvonne Astruc, qui sera son maître le plus marquant, au point de rester toujours à ses yeux « l'Absolu ». Enesco demande à Paul Paray, président des Concerts Lamoureux, de l'auditionner. Yehudi Menuhin joue la Symphonie espagnole de Lalo qui enthousiasme Paul Paray, lequel lui demande alors de venir la jouer devant le public parisien en tant que soliste avec l'Orchestre Lamoureux[2]. C'est le premier récital en Europe de Yéhudi Menuhin, un triomphe dont la presse fait écho. Il n'a que 10 ans. Le , il joue le concerto de Beethoven au Carnegie Hall avec le New York Symphony Orchestra dirigé par Fritz Busch, et c'est encore un succès. Son premier disque est enregistré en 1928. Sa carrière est définitivement lancée.

La ville de Bâle : lieu d'étude sous l'égide du violoniste Adolf Busch à partir de 1929.

Au bout de deux ans, Enesco pense qu'il lui serait profitable de changer de professeur et lui conseille Adolf Busch qui pourra lui apprendre le classicisme allemand. Yehudi Menuhin devient donc son élève pendant les étés 1929 et 1930 dans la ville de Bâle. Durant les hivers, Menuhin est en tournée en Europe et en Amérique, où il gagne environ dix fois plus d'argent que son professeur[2]. En 1930, la famille Menuhin s'installe à Ville-d'Avray en banlieue de Paris et y restera cinq ans, sympathisant avec la famille de Boris Vian, voisine[3]. En 1932, le compositeur britannique Edward Elgar l'invite au Royal Albert Hall de Londres pour enregistrer son concerto pour violon. Yehudi Menuhin n'a que 16 ans, mais il s'en tire parfaitement[4].
Il se marie le avec Nola Ruby Nicholas, fille d'un industriel australien. Ils ont deux enfants, Krov et Zamira.

Durant la Seconde Guerre mondiale, Menuhin est enrôlé dans l'armée américaine pour soutenir le moral des troupes alliées. Menuhin est heureux d'apporter son soutien et d'avoir un contact direct avec ses auditeurs. Mais il est épuisé par l'obligation de jouer trois fois par jour et il regrette de ne pas avoir de temps pour continuer à apprendre avec un professeur. Il ne voit que très peu sa femme et ses enfants. En 1944, il tombe amoureux d'une danseuse anglaise, Diana Gould (en). Il divorce, puis épouse Diana le . Il vivra heureux avec elle jusqu'à la fin de ses jours. Ils ont deux fils, Jeremy et Gerard.

En , Yehudi Menuhin, qui avait aidé Wilhelm Furtwängler dans sa difficile dénazification[5], vient à Berlin pour jouer le concerto pour violon de Beethoven avec le chef d'orchestre. Il s'ensuit dès lors des enregistrements de premier plan, comme celui du concerto de Beethoven à Lucerne en 1947[6] et à Londres en 1953[7],[8], ou encore le concerto pour violon de Brahms de 1949[9], de Béla Bartók (le deuxième) enregistré en 1953[10],[11] et celui, tout particulièrement symbolique, de Felix Mendelssohn enregistré en 1952[12],[13]. Cette série de concertos fut vite considérée comme l'un des sommets de la carrière du violoniste[14].

Menuhin déclara à la fin de sa vie que Furtwängler était le chef d'orchestre qui l'avait le plus marqué[15].

Yehudi Menuhin fait ses débuts de chef d'orchestre à Dallas en 1942, puis à Gstaad en Suisse en 1956 (où il fonde en 1957 le festival Menuhin), et à Bath en Angleterre en 1959. En 1955, à Bruxelles, alors qu'il est membre du jury du Prix du concours Reine Élisabeth, Yehudi Menuhin fait la connaissance du jeune Alberto Lysy, qui deviendra son élève. En 1962, Menuhin crée l'École Yehudi Menuhin à Cobham (en) dans le Surrey. En 1965, il reçoit le titre britannique de chevalier commandeur honoraire de l'Ordre de l'Empire britannique.

En 1970, il devient citoyen suisse, bourgeois de Granges dans le canton de Soleure. En 1978, Menuhin sera réuni avec le violoniste québécois Jean Carignan pour une prestation unique du Petit concerto pour Carignan et orchestre composé par le compositeur québécois André Gagnon. Ce concert sera diffusé dans la prestigieuse série télévisée The Music of Man animée par Menuhin et retransmise partout dans le monde, notamment par la Société Radio-Canada (CBC).

Dans les années 1980, Menuhin se produira plus de 200 fois en concert avec le jeune pianiste anglais Paul Coker, avec qui il jouera presque tout le répertoire pour violon et piano. Il réalise également dans ces années-là des enregistrements de jazz avec Stéphane Grappelli ou de musique indienne avec Ravi Shankar pour le célèbre album West Meets East (en) de 1968. En 1985, Yehudi Menuhin bénéficie de la citoyenneté britannique et son titre de chevalier honorifique devient un titre de chevalier.

En 1980, Menuhin crée à Paris la fondation Yehudi Menuhin, « Présence de la musique ». Cette fondation compte parmi ses lauréats des noms aussi importants que Nigel Kennedy, Jorge Chaminé, le Trio Wanderer[16], Claire Désert, Henri Demarquette, Yves Henry, Laurent Korcia, Jean-Marc Luisada, Irene Kudela, ou encore Pierre Lénert. En 1981, Menuhin est nommé chef d'orchestre du Royal Philharmonic Orchestra de Londres. Musicien complet, Menuhin est aussi un animateur et un homme voué aux causes justes. Il n’hésite pas à s’engager totalement lorsque les droits de l’homme, de la musique ou la paix sont compromis. Furtwängler, Rostropovitch, Estrella ont bénéficié de son appui. Pendant six ans, il a présidé le Conseil international de la musique de l'Unesco (1969-1975), multipliant les démarches humanitaires et contribuant à rapprocher les musiciens entre eux[17].

En 1993, Menuhin a le privilège d'être anobli par la reine du Royaume-Uni — life peer titre non héréditaire — en tant que Lord Menuhin of Stoke d'Abernon ; à ce titre, il siège à la Chambre des lords.

Yehudi Menuhin lance MUS-E[18] en 1994, un programme européen d’éducation artistique, qui existe aujourd’hui dans 12 pays européens, et s’adresse chaque année à environ 50 000 enfants de plus de 450 écoles primaires. L’objectif du programme lancé par Menuhin est d’introduire les arts à l’école primaire afin de développer la créativité des enfants, et de prévenir ainsi la violence et le racisme en encourageant l’harmonie et l’esthétique dès le plus jeune âge. Son ambition était de créer des projets de longue durée, destinés à donner une voix à ceux qui en sont privés, par le biais de l'expression artistique sous toutes ses formes.

Yehudi Menuhin meurt le , à Berlin, d'une crise cardiaque.

Influence et postérité

Connu pour ses interprétations d'une qualité souvent enflammée, parfois sans doute plus austère, mais ne se départissant jamais d'une vie intense et d'une profondeur indiscutable, il poursuivit ses concerts jusqu'à un âge très avancé pour se consacrer à la direction d'orchestre durant ses dernières années. Il a possédé un répertoire très vaste, des classiques aux contemporains.

Menuhin a joué, tout au long de sa carrière, un grand nombre d'instruments exceptionnels. La liste de ses instruments témoigne d’une préférence marquée pour les violons de Guarneri del Gesù.

Menuhin défendit Furtwängler, que l'on critiquait pour avoir prospéré sous le régime nazi, bien qu'il ne fût pas nazi lui-même. Il joua pour les réfugiés palestiniens et prit position en faveur d'un État unique laïc israélo-palestinien, indisposant par là-même Israël[19]. Il fut indésirable en URSS pour ses positions contre le régime soviétique[20]. Il fut membre d'honneur du Club de Budapest[21], lauréat du Nehru Peace Prize for International Understanding en 1960 et ambassadeur de bonne volonté de l'UNESCO de 1992 à 1999.

Instruments

Yehudi Menuhin (à gauche) et Paulo Coelho en 1999.
  • Stradivarius :
    • Soil, de 1950 à 1986[22]. Cédé à Itzhak Perlman parce que Menuhin le trouvait trop puissant ;
    • Prince Khevenhüller.
  • Guarnerius del Gesù :
    • d'Egville ;
    • Pollitzer-Koessler ;
    • ex-Menuhin, ex-Ebersholt, de 1978 à 1984 ;
    • Ysaÿe ;
    • Lord Wilton, de 1978 à 1999.

Bibliographie

  • (en) Yehudi Menuhin, Unfinished Journey, New York, Knopf, 1977 (ISBN 0-394-41051-3).
  • (en) Diana Menuhin, Fiddler's Moll. Life With Yehudi, New York, St. Martin's Press, 1984 [With a Foreword by Yehudi Menuhin] (ISBN 0-312-28819-0).
  • Yehudi Menuhin, La Légende du violon, Paris, Flammarion, 1996 (ISBN 978-2-0812-2438-4).
  • Jean-Michel Molkhou, Les Grands Violonistes du XXe siècle, Paris, Buchet-Chastel.
  • Yehudi Menuhin, Variations sans thème, Paris, Buchet Chastel, 2009 (ISBN 978-2-283-01806-4).
  • Yehudi Menuhin, L'Art de jouer du violon, Paris, Buchet Chastel, 2016 (ISBN 978-2-283-02964-0).
  • Yehudi Menuhin, Préface à Yoga Dipika; lumière sur le Yoga de B.K.S. Iyengar, 1966, Buchet Castel.

Distinctions

Notes et références

  1. Moshe Menuhin, La saga des Menuhin : autobiographie de Moshe Menuhin, Paris, Payot, , 326 p. (ISBN 978-2-228-85050-6).
  2. 1 2 3 4 5 Interview de Yehudi Menuhin dans le film de Bruno Monsaingeon intitulé Yehudi Menuhin, le violon du siècle, EMI classic archive, 2006.
  3. Photo de Boris Vian et Yehudi Menuhin jouant aux échecs.
  4. Non seulement Elgar en est pleinement satisfait, mais aussi le public puisque le disque est constamment réédité, par exemple en 1999, Great Recordings of the Century - Elgar: Violin Concerto, 'Enigma' Variations / Elgar, Menuhin, EMI Classics.
  5. Wilhelm Furtwängler et ses relations avec le régime nazi#La solitude et le soutien de grands musiciens juifs.
  6. « La première rencontre Menuhin-Furtwängler offre une lumière indicible ». Dictionnaire des disques Diapason : Guide critique de la musique classique enregistrée, Paris, Robert Laffont, , 964 p. (ISBN 2-221-50233-7), p. 111.
  7. « Incontestablement l'un des plus grands disques du XXe siècle ». Diapason (magazine), , p. 31.
  8. Il existe un autre enregistrement : à Berlin de 1947.
  9. « Rencontre qui tient du miracle pour l'éternité ». Patrick Szersnovicz, Le Monde de la musique, , p. 49.
  10. « C'est une rencontre historique que celle de Menuhin et de Furtwängler dans ce concerto que, sur le plan spirituel, ils abordent dans le même esprit que s'il s'agissait de celui de Brahms ». Dictionnaire des disques Diapason : Guide critique de la musique classique enregistrée, Paris, Robert Laffont, , 964 p. (ISBN 2-221-50233-7), p. 63.
  11. « Unique enregistrement de Bartók dans la discographie de Furtwängler, cette vision romantique offre une magie inimitable ». Patrick Szersnovicz, Le Monde de la musique, , p. 67.
  12. Les œuvres de Mendelssohn étaient interdites par les nazis en raison de ses origines juives.
  13. « Ce n'est pas par la beauté de la sonorité que Menuhin s'est imposé, mais avant tout par une présence déchirante, une humaine grandeur. Son enregistrement, réalisé au lendemain de la guerre est un document émouvant, témoin de la rencontre musicale de deux des plus irremplaçables interprètes que le monde occidental ait connus ». Dictionnaire des disques Diapason : Guide critique de la musique classique enregistrée, Paris, Robert Laffont, , 964 p. (ISBN 2-221-50233-7), p. 528.
  14. Un disque incluant les concertos de Beethoven et Mendelssohn avec Yehudi Menuhin et Furtwängler fut élu comme l'un des « cinq plus grands enregistrements du siècle » par les lecteurs du Monde de la Musique. Le Monde de la musique, , p. 73.
  15. Yehudi Menuhin a déclaré qu'il avait joué avec quasiment tous les chefs d'orchestre majeurs du XXe siècle mais que « Furtwängler [est] celui qui sans doute m'a le plus marqué ». Yehudi Menuhin, « La légende du violon », Flammarion, 2009, p. 242.
  16. Trio Wanderer que Yehudi Menuhin dirigera à Paris au théâtre des Champs-Élysées, à l'occasion du 10e anniversaire en 1990, lors d'un concert placé sous la direction de François Mitterrand, président de la République.
  17. Alain Paris, Universalis, 1999.
  18. (en) Page MUS-E sur le site officiel de la fondation Menuhin.
  19. Discours de Yehudi Menuhin à la Knesset en 1991, et voyage à Jérusalem en 1996.
  20. Interview de Yehudi Menuhin dans le film de Bruno Monsaingeon intitulé David Oistrakh: Artiste du peuple ?, Ideale Audience, 1984.
  21. (en) Lord Yehudi Menuhin, membre d'honneur du Club de Budapest.
  22. (en) « Antonio Stradivari, Cremona, 1714, the 'Soil' » Accès libre, Cozio Archive, sur https://tarisio.com

Articles connexes

  • Concours international pour jeunes violonistes Yehudi-Menuhin
  • Festival Menuhin de Gstaad
  • Histoire des Juifs en Suisse
  • Asian Music Circle
  • Maurice Gendron
  • Promenade Yehudi-Menuhin (Paris)

Liens externes